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Auteur : Gérard Mordillat
Date de saisie : 14/11/2012
Genre : Romans et nouvelles - français
Editeur : Calmann-Lévy, Paris, France
Prix : 17.40 €
ISBN : 978-2-7021-4332-2
GENCOD : 9782702143322
Sorti le : 22/08/2012
Jennie à 13 ans, pas de père et une mère remariée avec Mike, qui se tue le jour de son anniversaire (avec son propre cadeau) une moto. Olga se retrouve seule avec ses deux filles.
Trois ans plus tard, Slimane et deux autres enfants, une fille et un garçon agrandissent cette famille.
Mais un deuxième accident survient et les quatre enfants vont être séparés. A sa majorité Jennie recherchera ses frères et soeurs pour exaucer le voeu de sa mère. Jennie est un personnage attachant, dur, abimé par la vie.
Un beau texte, fort qui ne laisse pas indifférent.
À vingt-trois ans, Jennie n'a qu'un but dans la vie : réunir ses soeurs et son frère dispersés dans des familles d'accueil et un foyer afin de les emmener voir la mer depuis les falaises d'Étretat.
Au cours de cette quête à travers la France, Jennie va rencontrer Quincy, un acteur qui ne veut plus l'être. Lui aussi est animé d'une volonté sans faille : venger le suicide de sa mère.
Unis face au pire et portés par une détermination farouche, ces amants tragiques mettront tout en oeuvre pour parvenir à leurs fins.
Un récit incarné par une héroïne bouleversante et sublime, où l'espoir mène tout droit à la folie.
Gérard Mordillat est écrivain et cinéaste. Il a publié de nombreux romans, parmi lesquels L'Attraction universelle, Les Vivants et les Morts, Notre part des ténèbres... Il a tourné une vingtaine de films : La Voix de son maître, Vive la Sociale !, Cher Frangin, En compagnie d'Antonin Artaud, Paddy... Avec Jérôme Prieur, il est l'auteur de la trilogie documentaire sur les origines du christianisme Corpus Christi.
Pour France 2 et Arte, il a écrit et réalisé l'adaptation de son roman Les Vivants et les Morts.
Ils ne sont pas si nombreux de par chez nous à savoir torcher en quelques pages, en quelques scènes, de ces situations fulgurantes qui content non seulement l'actuelle société en crise mais le destin chaotique de personnages hors normes. Mordillat est de ceux-là. Il a la verve épique, hugolienne, il aime les misérables d'aujourd'hui.
Condensé de ses obsessions, Ce que savait Jennie reprend les thèmes chers à Mordillat : être le porte-parole des classes populaires, décrire une existence où l'on manque cruellement de lendemains qui chantent...
Avec le roman, il veut transmettre ses convictions, porter ses coups, dire qu'on doit protéger les faibles. Sinon, ils deviendront comme Jennie : des louves qui n'ont rien à perdre et sont prêtes à mourir pour exaucer une promesse d'enfant en criant "c'est trop injuste" aux flics qui l'entourent, comme s'ils venaient de lui refuser un bonbon.
A fleur d'émotions et de colères rentrées, Gérard Mordillat poursuit, à travers le parcours de ce couple assoiffé de justice, le tableau corrosif d'une époque sans foi ni loi.
On avait quitté Gérard Mordillat, romancier, réalisateur et compagnon de l'émission littéraire Des Papous dans la tête, sur une trilogie du combat syndical (Les vivants et les morts, Notre part des ténèbres et Rouge dans la brume). On le retrouve, toujours résolument engagé, dans un roman étonnant, qui, sous ses dehors naturalistes, a des allures de conte philosophique.//
Une Candide au féminin mais armée d'un poing américain, qui dans un monde où la mort rôde boit d'un trait tout l'amour comme toute la haine.
C'était un dimanche de juillet de l'an 2000.
Jennie pensait que c'était le pire jour de la semaine. Les autres n'étaient pas mieux, mais le dimanche, c'était vraiment le pire.
- Le pire du pire, murmura-t-elle, pour elle-même, ressassant qu'après ce dimanche il y en aurait un autre, encore un autre, puis beaucoup d'autres jusqu'à la fin des temps.
Elle aurait voulu que les semaines n'aient pas de dimanches. Qu'ils soient bannis du calendrier, effacés des mémoires. Même si, pour une fois, tout le monde était là.
- Tous là, un dimanche... murmura-t-elle, fermant les yeux pour ne pas les voir.
Chaque fois qu'il remplissait les verres de ses invités, Mike répétait :
- Quarante ans, ça se fête, merde !
Il y avait la grosse Amandine, la soeur de Mike qui travaillait chez Leclerc, son mari Max et leur fils Jean-jean, au visage un peu mou d'enfant trop gâté par sa mère ; ceux du chantier, Paul Guéry, leur chef d'équipe accompagné de sa femme qui tenait un salon de coiffure, Slimane, élégant et solitaire comme d'habitude, Freddy et sa copine Joëlle, dite Jo, une bonne vivante, Salva, avec Aïcha, dont la mère était française et le père algérien. Seul Moussa n'avait pas pu venir, sa mère se mourait à l'hôpital Tenon, mais Zoulé, sa femme, était là avec leurs trois gosses. Et puis il y avait surtout Olga, la mère de la petite Malorie, la fille de Mike.
Jennie, Olga l'avait eue avec un autre.
Bien qu'elle n'ait que treize ans, Jennie considérait Malorie comme sa propre fille. C'était pour elle que sa mère l'avait faite. Jennie avait accueilli sa naissance avec une joie indescriptible. C'était son bébé, sa princesse, sa Sissi impératrice. Dès la naissance de Malorie, avec un instinct très sûr, abandonnant pour toujours ses poupées, Jennie s'en occupa d'autant plus facilement que Mike n'avait rien à faire d'un nourrisson dans les langes et qu'Olga, trois jours à peine après avoir accouché, reprenait le chemin de l'usine où elle travaillait sur une chaîne de montage de stylos de luxe. Comme disaient les voisins, Jennie était «la petite maman» de Malorie. Malorie qui aurait quatre ans dans trois mois, en octobre, mais qui, aujourd'hui plus que jamais, restait accrochée à Jennie.
Tout ce monde l'effrayait.