Auteur : Jeanne Herry
Date de saisie : 09/01/2008
Genre : Romans et nouvelles – francais
Editeur : Gallimard, Paris, France
Collection : Folio, n 4634
Prix : 4.20 / 27.55 F
ISBN : 978-2-07-034744-5
GENCOD : 9782070347445
Sorti le : 04/10/2007
- Les presentations des editeurs : 17/09/2008
Le petit trou etait entre mes pieds. Bien au milieu. Et mes pieds pendaient dans le vide. J’etais petite. J’etais grande comme une personne agee de 6 ans. Ce petit trou etait immense : a travers lui defilaient des kilometres de goudron. Petite, j’ai vu la terre d’Afrique. Et pas celle d’Afrique du Nord, non, celle d’Afrique noire, celle ou habitent des lions. En descendant de l’avion, nous avons pris un taxi, et le trou dans le plancher de ce taxi, ce petit trou que j’ai fixe des yeux pendant des kilometres de routes africaines, etait d’un exotisme etourdissant, hypnotique.
Ma grand-mere etait antillaise, mon pere est cambre et je brunis au soleil.
Le tronc des cocotiers et leur grace de cou de girafe. Le marche aux poissons et la glace qui fond sur les etals. Le rhum. L’odeur de la canne a sucre coupee. Il me reste cette familiarite-la. Des couleurs, des couleurs.
La vie, c’est 80 etes. En moyenne, raconte Jeanne Herry dans ce texte d’une rare maturite, ou elle rend hommage a son grand-pere disparu. Elle y evoque aussi, avec beaucoup de pudeur, sa vie, ses envies, ses inquietudes, avec un sens du detail et de la drolerie. Un recit touchant et sensible.
- Les courts extraits de livres : 17/09/2008
La vie, c’est 80 etes. En moyenne. Cela m’a frappee il y a trois ans. Je me souviens tres precisement quand. 80 etes. On pourrait dire, je pourrais dire : 80 hivers… 80 printemps. Je pourrais le dire, mais ce n’est pas ca qui m’a frappee il y a trois ans. La vie, ma vie et aussi celle de maman, c’est 80 etes, et ca c’est frappant. C’est peu.
Je pourrais dire aussi, mais cela n’engage que moi : la vie, c’est 900 chaussures. 450 paires. En comptant les chaussures ordinaires, les souliers, les baskets, les chaussons, les tongs, les bottes en caoutchouc, les chaussures de ski, les moon-boots, les espadrilles, les nouilles, les palmes et l’unique paire de chaussures de bowling que j’ai jamais portee.
Si je participe un jour a une emission de television qui aura pour objet de fouiller mon passe et de convoquer mes fantomes en chair et en os sur le plateau, si l’animateur ouvre un rideau derriere moi, que je me retourne et que je vois alignees, non les vieux enfants de ma jeunesse mais toutes les chaussures que j’ai portees depuis ma naissance, les vraies, celles que j’ai vraiment portees, je pleure. Et ma mere aussi, peut-etre.
La vie, c’est 80 etes et pas plus ou pas beaucoup plus. Cela m’a frappee il y a trois ans, je m’en souviens tres precisement. J’etais dans une voiture. C’etait l’ete, on roulait dans la campagne avec Judith, on allait retrouver Olivia, une amie, a Ruffec. 80 etes. Je l’ai pense, je me suis enfoncee dans le siege du mort, a l’avant, et je l’ai dit a Judith. Elle a ete tres receptive. Peut-etre meme qu’elle s’est enfoncee derriere le volant, tout en regardant la route ou le retroviseur. Elle comprend ca, Judith. On s’aime pour ca, aussi. C’est une histoire d’amitie.
Meme entoure d’une equipe sacrement fortiche, l’animateur ne pourrait pas retrouver toutes mes chaussures, c’est impossible.
Bien sur, on pourrait travailler d’arrache-pied tout le reste de l’annee, qui n’est pas jaune et bleu comme l’ete, mais plutot marron-marron, et mettre des sous de cote. Et la, au moment ou on est tres palotte, sortir du chemin, ramasser les deniers dans le fosse et partir voir la mer. Outre-mer. Avec son amoureux. Mettre un peu son corps dans le bleu, et marcher pieds nus. Mais ca, c’est biaiser. C’est tres agreable, mais c’est biaiser. Ce n’est pas l’ete, ce n’est pas un ete, c’est un repit. Un souffle chaud dans la paume de la main, celle qui pend a la fenetre de la voiture. Ca ne change rien au grand probleme. Ce n’est qu’une solution de pacotille. Quinze jours formidables et petits.
Je recommande cette solution a tout le monde. Je dis : Allez-y, ca vaut le coup. Et c’est vrai, ca vaut les deniers, et l’arrache-pied, et je fais la fiere parce que je suis doree. Je suis doree, mais j’ai froid dans le dos parce que ca me rappelle l’ete dernier. Et je me languis du prochain. L’ete dernier, l’ete prochain, ca fait deja 2 etes. 2 sur 80. Et les 24 que j’ai deja vecus ? Ils ont fait leur travail : ils sont passes. Ils ont fait du zele, ils sont passes tres vite.
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