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Antigone

Auteur : Jean Anouilh

Date de saisie : 13/03/2008

Genre : Theatre

Editeur : Table ronde, Paris, France

Collection : La petite Vermillon, n 300

Prix : 5.40 / 35.42 F

ISBN : 978-2-7103-3040-0

GENCOD : 9782710330400

Sorti le : 13/03/2008

  • Les presentations des editeurs : 17/09/2008

L’Antigone de Sophocle, lue et relue et que je connaissais par coeur depuis toujours, a ete un choc soudain pour moi pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges. Je l’ai reecrite a ma facon, avec la resonance de la tragedie que nous etions alors en train de vivre.

Jean Anouilh.

  • Les courts extraits de livres : 17/09/2008

Un decor neutre. Trois portes semblables. Au lever du rideau, tous les personnages sont en scene. Ils bavardent, tricotent, jouent aux cartes.
Le Prologue se detache et s’avance.

LE PROLOGUE

Voila. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise la-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va etre Antigone tout a l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermee que personne ne prenait au serieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Creon, son oncle, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aime vivre. Mais il n’y a rien a faire. Elle s’appelle Antigone et il va falloir qu’elle joue son role jusqu’au bout… Et, depuis que ce rideau s’est leve, elle sent qu’elle s’eloigne a une vitesse vertigineuse de sa soeur Ismene, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes la bien tranquilles a la regarder, de nous qui n’avons pas a mourir ce soir.
Le jeune homme avec qui parle la blonde, la belle, l’heureuse Ismene, c’est Hemon, le fils de Creon. Il est le fiance d’Antigone. Tout le portait vers Ismene : son gout de la danse et des jeux, son gout du bonheur et de la reussite, sa sensualite aussi, car Ismene est bien plus belle qu’Antigone, et puis un soir, un soir de bal ou il n’avait danse qu’avec Ismene, un soir ou Ismene avait ete eblouissante dans sa nouvelle robe, il a ete trouver Antigone qui revait dans un coin, comme en ce moment, ses bras entourant ses genoux, et il lui a demande d’etre sa femme. Personne n’a jamais compris pourquoi. Antigone a leve sans etonnement ses yeux graves sur lui et elle lui a dit oui avec un petit sourire triste… L’orchestre attaquait une nouvelle danse, Ismene riait aux eclats, la-bas, au milieu des autres garcons, et voila, maintenant, lui, il allait etre le mari d’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.
Cet homme robuste, aux cheveux blancs, qui medite la, pres de son page, c’est Creon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigue. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. Avant, du temps d’?dipe, quand il n’etait que le premier personnage de la cour, il aimait la musique, les belles reliures, les longues flaneries chez les petits antiquaires de Thebes. Mais ?dipe et ses fils sont morts. Il a laisse ses livres, ses objets, il a retrousse ses manches et il a pris leur place.
Quelquefois, le soir, il est fatigue, et il se demande s’il n’est pas vain de conduire les hommes. Si cela n’est pas un office sordide qu’on doit laisser a d’autres, plus frustes… Et puis, au matin, des problemes precis se posent, qu’il faut resoudre, et il se leve, tranquille, comme un ouvrier au seuil de sa journee.
La vieille dame qui tricote, a cote de la nourrice qui a eleve les deux petites, c’est Eurydice, la femme de Creon. Elle tricotera pendant toute la tragedie jusqu’a ce que son tour vienne de se lever et de mourir. Elle est bonne, digne, aimante. Elle ne lui est d’aucun secours. Creon est seul. Seul avec son petit page qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui.
Ce garcon pale, la-bas, au fond, qui reve, adosse au mur, solitaire, c’est le Messager. C’est lui qui viendra annoncer la mort d’Hemon tout a l’heure. C’est pour cela qu’il n’a pas envie de bavarder ni de se meler aux autres. Il sait deja…
Enfin les trois hommes rougeauds qui jouent aux cartes, leur chapeau sur la nuque, ce sont les gardes. Ce ne sont pas de mauvais bougres, ils ont des femmes, des enfants, et des petits ennuis comme tout le monde, mais ils vous empoigneront les accuses le plus tranquillement du monde tout a l’heure. Ils sentent l’ail, le cuir et le vin rouge et ils sont depourvus de toute imagination. Ce sont les auxiliaires, toujours innocents et toujours satisfaits d’eux-memes, de la justice. Pour le moment, jusqu’a ce qu’un nouveau chef de Thebes dument mandate leur ordonne de l’arreter a son tour, ce sont les auxiliaires de la justice de Creon.