Auteur : Benoit Hopquin
Date de saisie : 31/12/2008
Genre : Biographies, memoires, correspondances…
Editeur : Calmann-Levy, Paris, France
Prix : 16.00 / 104.95 F
ISBN : 978-2-7021-3988-2
GENCOD : 9782702139882
Sorti le : 07/01/2009
L’Alinea (Martigues)Dialogues (Brest)Durance (Nantes)Maison du livre (Rodez)Mollat (Bordeaux)Ombres Blanches (Toulouse)Sauramps (Montpellier)Thuard (Le Mans)
- Le courrier des auteurs : 08/01/2009
Il faut que je passe. Ne pas regarder. Se concentrer sur ces personnes que je croise, cette memere et son toutou, cet adolescent et son MP3. Tete droite, yeux fixes sur l’horizon. Penser a autre chose. Que c’est long ! Enfin, j’y suis presque. Le magasin d’electromenager est en vue, hourra ! J’apercois les machines a laver, les fours, mon salut. Las ! Une seconde d’inattention (d’inattention, vraiment ?) : j’ai regarde. Aimante, voila que je fais demi-tour. Ils sont la, debout ou couches. Ils me happent, ces livres, qu’ils parlent des rites bochimans ou des coutumes germanopratines. Derriere, il y en a d’autres, sur les presentoirs, que je devine doux au toucher, comme une sculpture, agreable au feuilleter, comme une brise de mer. C’est foutu. Je sais comment tout cela va finir : bientot, je serai la tete d’equerre, en train de passer en revue les rayonnages. Dans la vitrine, je regarde une derniere fois mon reflet, mes bras encore vides, ma bouille de vaincu. Je rentre.
Benoit Hopquin
- Les presentations des editeurs : 31/12/2008
Ils etaient musiciens a la cour, soldats revolutionnaires, heros de Verdun, ecrivains, compagnons de la Liberation. Ils etaient a la tribune de l’Assemblee nationale ou sur les plages du Debarquement, en Provence, a l’Odeon ou a Polytechnique.
Ils etaient noirs. Qui s’en souvient ? Qui se souvient de Habib Benglia, qui joua dans Les Enfants du paradis et dans La Grande Illusion, ou de Rene Maran, qui obtint le prix Goncourt en 1921 ?
Apres les independances, dans les annees 60, la France et l’Afrique se sont separees de corps mais aussi eloignees d’esprit. Chacune est partie de son cote. Dans les livres d’histoire, soit par honte d’avoir colonise, soit par depit d’avoir ete largues, soit encore par indifference, nous avons peu a peu gomme les traces de couleur de notre saga nationale. C’est oublier Felix Eboue qui, alors qu’il etait gouverneur du Tchad, fut parmi les premiers resistants a repondre a l’appel du general de Gaulle ; c’est oublier Gaston Monnerville, president du Senat et ainsi deuxieme personnage de la Republique pendant plus de vingt ans. C’est oublier aussi Edmond Albius, ancien esclave qui decouvrit la technique de la fecondation artificielle de la vanille, ou Louis Delgres, qui prefera mourir plutot que d’accepter le retablissement de la servitude en Guadeloupe.
D’une ecriture vive et brillante, Benoit Hopquin retrace les destins exceptionnels et romanesques de ces figures noires, ces pionniers qui durent les premiers lutter contre les prejuges et pour l’egalite.
Benoit Hopquin, quarante-six ans, est grand reporter au Monde.
CHEVALIER DE SAINT-GEORGE. JEAN-RAPTISTE BELLEY. LOUIS DELGRES. FRANCOIS-AUGUSTE PERRINON. EDMOND ALRIUS. BLAISE DIAGNE. SIDI SAMAKE. HARIB BENGLIA. RENE MARAN. FELIX EBOUE. CHARLES N’TCHORERE. ADDI BA, MABOULKEDE. LEOPOLD SEDAR SENGHOR. AIME CESAIRE. GASTON MONNERVILLE
- Les courts extraits de livres : 31/12/2008
Extrait du preambule :
Ils etaient musiciens a la cour, soldats revolutionnaires, hommes politiques, heros de Verdun, comediens, ecrivains, resistants, compagnons de la Liberation. Ils etaient a la tribune de l’Assemblee nationale ou sur les plages du Debarquement en Provence, a l’Odeon ou a Polytechnique. Ils ont en commun d’etre noirs et d’avoir fait la France. Qui s’en souvient ?
Ces personnages sont pour la plupart oublies, rayes de notre histoire collective, s’ils ont seulement eu la chance d’y entrer un jour.
L’Assemblee nationale compte depuis les elections legislatives de 2007 une deputee de couleur, elue dans une circonscription de metropole, George Pau-Langevin, representante de Paris. Elle succede a Kofi Yamgnane, ancien depute du Finistere et ancien secretaire d’Etat, Francais d’origine togolaise qui passait pour pionnier de l’integration dans les annees 90. La television s’enorgueillit depuis d’avoir des presentateurs antillais et le gouvernement une nouvelle secretaire d’Etat d’origine africaine. Premier prefet noir, premier president de club de football noir : a ecouter certains commentaires, on a le sentiment que c’est la une vie commune qui s’ebauche. C’est negliger le fait que les Antillais, les Guyanais et les Reunionnais sont francais depuis trois siecles et demi et qu’il convient de se demander pourquoi on a attendu si longtemps pour s’en rendre compte.
C’est oublier Gaston Monnerville, president du Senat pendant vingt-deux ans, entre 1946 et 1968, et elu du Lot. C’est oublier Felix Eboue, gouverneur de la Guadeloupe, equivalent en fonction d’un prefet. C’est oublier le prix Goncourt de Rene Maran, en 1921. C’est oublier Francois-Auguste Perrinon, sorti de Polytechnique en 1834. C’est oublier, oublier… C’est oublier tous ceux qui depuis deux siecles se sont battus pour l’egalite. C’est faire table rase de leurs vies de combat, de leurs grandes et petites victoires sur les prejuges.
Aujourd’hui, il ne s’agit donc que de retrouvailles, ce qui explique d’ailleurs qu’elles soient moins simples qu’une premiere rencontre. Le passe partage s’ancre dans la chair vive de l’esclavage et de la colonisation. Mais il fut aussi rendez-vous du donner et du recevoir, comme l’affirmait Leopold Sedar Senghor.
Apres les independances, dans les annees 60, la France et l’Afrique se sont separees de corps – l’histoire, la morale l’exigeaient -, mais aussi eloignees d’esprit. Les departements ultramarins, ces confettis de l’Empire, semblaient devoir s’emanciper a leur tour. A tout le moins, ses habitants refusaient d’anonner plus longtemps nos ancetres les Gaulois, retrouvaient la fierte de la culture creole. Chacun est ainsi parti de son cote, a trace sa route, son histoire sous le bras. Dans les livres francais, soit par honte d’avoir colonise et asservi, soit par depit d’avoir ete largue, soit par indifference affective, on a ecarte ces annees vecues ensemble. Les traces de couleur ont ete peu a peu gommees de notre saga nationale.