Auteur : Jean-Yves Cendrey
Preface : Jean-Marie Laclavetine
Date de saisie : 11/10/2007
Genre : Societe Problemes et services sociaux
Editeur : Gallimard, Paris, France
Collection : Blanche
Prix : 11.00 €
ISBN : 978-2-07078609-1
GENCOD : 9782070786091
Sorti le : 11/10/2007
- La Radio des libraires : Laurent Layet de la librairie AU BROUILLON DE CULTURE a CAEN, France (visiter son site) – 19/10/2007
Telecharger le MP3
Laurent Layet – 19/10/07
- Les presentations des editeurs : 19/10/2007
En 2005, Jean-Yves Cendrey publia Les jouets vivants. Il y racontait l’histoire authentique d’un instituteur pedophile en Normandie. A la suite de cette publication, il recut un important courrier : temoignages, recits, appels au secours… Tout d’abord, il decida de ne pas repondre : le role de l’ecrivain n’est pas de rendre la justice ni de mener des enquetes policieres. Une lettre, cependant, ne se laissait pas oublier. Redigee par une mere, elle decrivait la vie et le suicide de Celine, une jeune fille du sud de la France, qui avait eu a connaitre un instituteur semblable : lui aussi utilisait pour son plaisir les enfants dont il avait la charge, lui aussi etait protege par sa corporation, par sa hierarchie, par les parents eux-memes, par la peur des uns et des autres, bref par une societe plus desireuse de silence que de verite – le prix a payer fut-il pour les enfants celui de la souffrance ineffacable, voire de la mort. C’est l’histoire de Celine que Jean-Yves Cendrey a decide de raconter ici. Revisitant le genre litteraire du tombeau, il grave une stele pour qu’un peu d’elle vive encore : l’essentiel de la litterature est dans ce geste.
Jean-Yves Cendrey est l’auteur d’une dizaine de livres, parmi lesquels Principe du cochon, Les morts vont vite, Oublier Berlin. Avec Marie NDiaye, il a publie en 2007 un recueil de theatre, Puzzle (Trois pieces).
- Les courts extraits de livres : 07/01/2008
Celine
C’est au detour d’une phrase intrigante que l’on vous croise, longtemps apres votre mort. On pourrait la citer, rapporter dans quelles circonstances on l’a lue. Mais a quoi bon, puisque vous n’etes rien pour nous, et que ca ne sera sous peu qu’une formalite que de vous laisser a votre sanglant anonymat.
Rien ne se passe comme prevu. D’intrigante, la phrase s’est faite obsedante. Elle oblige a imaginer, et cela n’est pas supportable. Alors on part a votre recherche, Celine.
A cinq ans de distance et six cents kilometres plus tard, on vous trouve enfin. Votre corps repose assis sur le sol, adosse contre le mur de gauche. Vos vetements sont en ordre. Votre tete est affaissee sur votre poitrine. Votre main droite tient une arme a feu de type revolver RMR Manurhin special police F1, calibre 357 magnum.
Tandis qu’il degage l’arme de votre main, un homme dit votre corps raide et froid au toucher, le dit celui d’une jeune femme de race blanche, grande, athletique, aux cheveux longs et bruns. Il dit l’arme approvisionnee. Il dit la neutraliser en basculant le barillet. Il dit qu’une cartouche percutee se trouve face a la chambre de l’arme. Il dit que le barillet contient six cartouches de calibre 38 special, dont une seule est percutee. Il dit que cette arme est la votre.
Votre tete dans ses mains, un nouvel homme dit constater la presence d’un orifice temporal droit et d’un second orifice, temporal gauche, compatible avec un trajet de projectile de droite a gauche, legerement en haut et en arriere. Il dit noter la presence d’un ecoulement de sang seche entre vos narines et vos levres, de fines gouttelettes de sang seche sur vos mains, de beaucoup de sang sur votre pantalon de jean.
Les deux hommes deplacent votre corps et disent observer un impact de projectile sur le mur du fond, a 75 centimetres de hauteur et a 19 centimetres de l’angle de ce mur avec le mur de gauche. Ils disent decouvrir une balle ecrasee ainsi que la chemise du projectile. Ils disent trouver sur vous un trousseau de cles, une piece d’identite, ainsi qu’une somme d’argent liquide de 155 francs, constituee d’un billet de cent francs, de quatre pieces de dix francs, deux pieces de cinq francs, deux pieces de deux francs, et une de un franc.
Un troisieme homme ouvre votre sac a dos et dit trouver un walkman, un telephone portable, un roman, une casquette, deux sous-vetements, une montre, une boite de vitamines, une brosse a cheveux, un bloc de feuillets, un carnet de musique, un agenda, des accessoires de maquillage.
Il se rend dans la piece contigue ou il inventorie un casier a votre nom. Il dit y trouver une vareuse, un blouson d’intervention, une cravate, un pull, un calot, un impermeable, un ceinturon supportant des menottes et leurs cles, une matraque, un etui de revolver et un (…)