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GDF-Suez, une fusion sous tension : enquete dans les coulisses du grand capitalisme francais

Auteur : Joan Condijts | Feryel Gadhoum

Date de saisie : 03/04/2008

Genre : Documents Essais d’actualite

Editeur : Michalon, Paris, France

Prix : 18.00 / 118.07 F

ISBN : 978-2-84186-446-1

GENCOD : 9782841864461

Sorti le : 03/04/2008

  • Les presentations des editeurs : 12/04/2008

Ceci n’est pas un roman… Malgre les coups fourres, les complots et les intrigants qui confinent au romanesque. Ceci est une chronique de faits reels. La chronique d’une affaire qui a tenu le monde politico-economique europeen en haleine durant pres de deux ans, qui a implique six gouvernements, qui est entree dans les annales parlementaires francaises avec 137 449 amendements deposes, qui a genere des milliards d’euros d’echanges boursiers, des dizaines de millions d’euros d’honoraires de bureaux d’avocats et de banques d’affaires, qui a determine le futur de plus de deux cent mille travailleurs sur cinq continents. La chronique surtout d’un capitalisme empreint de considerations politiciennes, matine de raison d’Etat. Un capitalisme a la francaise. Marque par l’hegemonie d’un microcosme aux confins des cabinets et des conseils d’administration. Fruit d’une enquete scrupuleusement et rondement menee, depuis octobre 2006, de Dubai a Boston, en passant par Rome, Paris et Bruxelles, ce livre apparait comme le miroir sans tain de petits arrangements entre amis.

Joan Condijts est journaliste au Soir et Feryel Gadhoum au Figaro. Tous deux suivent l’actualite energetique (GDF, EDF Suez-Electrabel, Total…) depuis plusieurs annees.

  • Les courts extraits de livres : 12/04/2008

Paris, vendredi 24 novembre 1995

La biere ?
– Pour Monsieur.
Le serveur pose le verre sur la table puis s’eloigne. Le stylo, qui avait marque une pause, complete le schema. Un trace simple, limpide. En haut, Suez. En bas, Electrabel. Entre la Compagnie du canal et l’electricien belge, des noms, des chiffres et des fleches couches sur un feuillet irregulierement dentele, arrache a un carnet.
On se recentre sur l’eau et l’energie, on acheve l’absorption de la Societe generale de Belgique, on acquiert Tractebel mais l’objectif, c’est Electrabel dont on ne detient aujourd’hui que 6 %. Le jour ou on l’aura, associe a Tractebel, couple a la Lyonnaise des eaux, on sera parmi les grands d’Europe, capables de fournir de l’electricite, du gaz, de l’eau, de traiter les dechets, commente Gerard Mestrallet qui trempe ses levres dans la mousse.
Francois Jaclot ecoute. Fraichement catapulte a la tete du departement financier de Suez, l’enarque contemple la voie qui mene de la holding a l’industrie, cette cascade de participations transformee en societe homogene. Le grand argentier regarde le president. Croisement d’Averell Dalton et de George Clooney, meche ondulee, sourire contagieux, Gerard Mestrallet a herite d’un empire en declin : la compagnie fondee en 1858 par Ferdinand de Lesseps pour percer un canal entre la Mediterranee et la mer Rouge navigue aujourd’hui a vue.
La societe sert de fourre-tout. Et, sans changement, Suez ne servira bientot plus a rien. A cette strategie defaillante s’ajoute une defaillance financiere : premiere dans l’histoire de la compagnie, les resultats sont dans le rouge. Le deficit du premier semestre de l’annee a depasse les 500 millions d’euros. La crise immobiliere et le ressac economique l’ont frappee de plein fouet. Aussi, le mercredi 14 juin 1995, lors d’une assemblee generale, trois administrateurs de Suez, parmi les grands patrons de la place parisienne, Philippe Jaffre (Elf), Jacques Friedmann (UAP) et Jean-Louis Beffa (Saint-Gobain), ont-ils flingue leur pair, Gerard Worms, president de la Compagnie du canal, l’accusant de comploter.
Nomme capitaine apres cette reunion houleuse, extirpe de son exil bruxellois (ou il etait administrateur delegue de la Generale de Belgique) pour succeder a son pere spirituel (Gerard Worms), Gerard Mestrallet n’a que quelques mois pour redresser la barre, donner un cap. Il le sait. Et il le fera.
Sous les yeux de son premier lieutenant, a cette table du Vivarois, une maison de bouche de l’avenue Victor-Hugo, dans le seizieme arrondissement, le president a quasiment ebauche une decennie de strategie. Actuellement ballotte entre la finance, l’immobilier et diverses industries, Suez se concentrera dans les prochaines annees sur l’energie et l’environnement. Voire les telecommunications. Soit les services aux collectivites ou les utilities comme disent les Anglo-Saxons. Comment ? En approfondissant les relations existantes avec la Lyonnaise des eaux et avec la Societe generale de Belgique. En se fondant sur les deux fleurons de cette derniere : Tractebel et Electrabel. Mais le bout de papier, inestimable (ces operations se chiffrent en dizaines de milliards d’euros), sur lequel sont inscrites ces predictions, ne livre pas l’entierete de la pensee presidentielle.
Gerard Mestrallet apercoit les limites de son plan : malgre la presence de la Lyonnaise et de ses eaux, la Generale et son energie peseront lourd dans l’ensemble. Tres lourd. Autrement dit, Suez se revelera plus belge que francaise. Pour contrebalancer cet exces, le patron entrevoit une piste politiquement incorrecte. Pour l’heure. Gerard Mestrallet n’ignore pas que, en coulisses, les privatisations d’Electricite de France (EDF) et de Gaz de France (GDF) sont envisagees. Le president du RPR, Jacques Chirac, n’a-t-il pas commande une etude sur le sujet a la banque d’affaires americaine Goldman Sachs voici quelques mois ? Le meme homme occupe aujourd’hui l’Elysee.