Auteur : Isabelle Hoog Naginski
Date de saisie : 30/11/2007
Genre : Litterature Etudes et theories
Editeur : Presses universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, France
Collection : Cahiers romantiques, n 13
Prix : 24.00 / 157.43 F
ISBN : 978-2-84516-358-4
GENCOD : 9782845163584
Sorti le : 30/11/2007
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- Les presentations des editeurs : 20/12/2007
Cette etude met en lumiere un aspect de l’oeuvre de George Sand jusqu’ici peu visible. A partir de 1835, on la voit sortir de la sphere privee. Pour repondre au desarroi de son siecle, elle penetre dans la sphere publique et presente un vaste projet de regeneration sociale. Se rendant compte de la fonction proprement nourriciere des mythes, elle faconne des fictions ou l’on decouvre en filigrane tout un appareil mythologique, original et puissant, inspirees de modeles trouves dans l’Antiquite, l’esoterisme, le Celtisme, les societes secretes et les heresies medievales.
Avec la deuxieme version de Lelia, c’est Promethee qui derobe le feu a la gent masculine. Myrza propose une autre Genese videe du peche originel. Avec Jeanne et Le Compagnon du Tour de France, Sand rend fierte et voix aux classes oubliees. Spiridion est un appel a l’heresie et une annonce du regne de l’Esprit. Enfin, Wanda, la sibylle de La Comtesse de Rudolstadt, prophetise l’avenement d’un Nouvel Age, d’une Nouvelle Eglise et d’un nouveau contrat social.
Ainsi, la decennie mythographique de Sand aura ete une phase lumineuse et experimentale dans sa vaste entreprise d’explorer les frontieres maximales du roman. En faisant de ses fictions l’instrument d’une reconstruction symbolique de la societe, Sand se montre une veritable annonciatrice de l’avenir.
- Les courts extraits de livres : 20/12/2007
Extrait de l’introduction :
Mythographies. George Sand et les Mythes
Dans cet ouvrage je me propose de degager les voies diverses suivies par George Sand dans sa tentative de poser les fondements d’une nouvelle religion syncretique et d’une mythologie neuve destinees a la France post-revolutionnaire. Les annees 1836-1846 ont ete pour elle des annees extraordinaires d’epanouissement intellectuel, une periode intense de reflexion, de lecture, et surtout de creation litteraire. Pendant cette decennie, elle a oeuvre a forger des mythes adaptables a son siecle – un imaginaire religieux et mythologique assez efficace pour mettre sur la voie de la guerison une societe a ses yeux metaphysiquement malade. Comme le dit si bien Beatrice Didier, ces annees representent pour Sand une periode de bouillonnement intellectuel ou elle subit des influences diverses, et jamais de facon servile, avec un don extraordinaire d’assimilation et de recreation qui est peut-etre le signe des vrais genies.
Ce livre que je voue a l’etude de la pensee sandienne est organise en huit chapitres : deux traitant de deux aspects d’une grande figure grecque de la revolte, Promethee, qui apparait dans Lelia ; quatre consacres au mythe des origines d’apres Le Poeme de Myrza, Jeanne et Le Compagnon du tour de France ; un a l’heresie de Joachim de Flore telle qu’elle est exploitee dans Spiridion : et un dernier au projet heretique et utopique de Wanda tel qu’il s’exprime dans La Comtesse de Rudolstadt.
D’apres la critique contemporaine de Sand, le romantisme francais nous apparait moins comme un mouvement litteraire uniforme que comme une collection de groupuscules se referant a des programmes differents, des visions en conflit, des systemes esthetiques et philosophiques opposes et en evolution. Ce qui peut nous paraitre particulierement frappant est la modification de la perspective ideologique dans la production litteraire entre les annees trente et quarante, le passage d’un romantisme que l’on peut qualifier de solitaire a un romantisme solidaire. Le premier romantisme, voue a la glorification d’un heros dans sa solitude meditative en est venu a une ethique plus genereuse, fondee sur la solidarite. Les personnages a monologues ont fait place a des heros et des heroines en dialogue charges d’affirmer leur humanite commune et d’annoncer un avenir utopique. Le besoin initial de rompre avec un passe trop lourd, de s’engager dans un total iconoclasme, a ete remplace par un desir de reconstruire, et meme de renouer avec certaines valeurs des siecles precedents. Deux domaines s’ouvrent aux intellectuels du temps de Sand dans leur appel urgent a une reconstruction symbolique. Entreprendre d’etablir une nouvelle religion amenera une resacralisation bien necessaire a la societe francaise. Et la creation d’une mythologie a la mesure de la periode post-revolutionnaire entrainera celle-ci vers une ethique nouvelle et un civisme fervent. Des socialises utopiques comme Pierre Leroux et Jean Reynaud, des historiens tels que Jules Michelet, Edgar Quinet et Henri Martin, des theologiens comme Lamennais se mobilisent pour la mise en place de ce que D. G. Charlton a appele les religions seculieres. Comme le rappelle si bien Michele Hecquet, la pensee sociale de l’epoque n’offre alors aucune vision globale qui ne soit religieuse. Dans ces temps pre-marxistes, loin d’etre l’opium du peuple, la religion est consideree comme le seul antidote a une societe sans croyance, livree tout entiere a l’egoisme, l’unique frein a un pouvoir sans autre regle que son interet, sans autre borne que sa propre force. Leroux, ecrivant en 1831 ; peut meme proposer l’avenement d’une future pan-religiosite : Le temps vient ou nous embrasserons, ou nous relierons toutes les conceptions religieuses, et ou, de toutes les traditions, nous formerons la tradition universelle, la grande Bible de l’Humanite.