Auteur : Michel Onfray
Date de saisie : 18/11/2007
Genre : Philosophie
Editeur : Grasset, Paris, France
Collection : Figures
Prix : 20.90 / 137.10 F
ISBN : 978-2-246-64811-6
GENCOD : 9782246648116
Sorti le : 24/10/2007
- Les presentations des editeurs : 19/11/2007
Comment vivre avec un squelette en soi ? Pour quelles raisons preferer Don Quichotte a Don Juan ? Quel gout a une olive sans peau, sans chair et sans noyau ? Pourquoi le fetiche des chamanes et la piece du galeriste new-yorkais sont-ils une seule et meme chose ? Dans quelles circonstances le pedophile beneficie-t-il d’une totale impunite ? Qu’est-ce qui declenche la genuflexion de la plupart des philosophes ? Les nouilles et les brosses a dents ont-elles une ame ? Pourquoi Berlioz est-il un anti-Debussy ? Comment devient-on ce que l’on est ? Pourquoi Rimbaud ratait-il ses photographies dans le Harar ? Selon quelles modalites les marchands d’art inuit perpetuent-ils la tradition coloniale ? Comment photographier le silence ? Que penser de la haine de la plupart des philosophes contemporains pour le Peuple ? N’y a-t-il d’ecologie que chez les adorateurs du pot catalytique ? A quoi peut bien ressembler un chretien epicurien ? Qu’est-ce qu’une famille postmoderne ? Ou, quand et comment debusquer des populicides ?
Voici une poignee de questions auxquelles Michel Onfray repond dans le quatrieme tome de son journal hedoniste…
Michel Onfray a deja publie une vingtaine d’ouvrages aux editions Grasset. Son oeuvre – ou, a cote de ses essais et de son Journal hedoniste, figure une monumentale Contre-histoire de la philosophie – est desormais traduite dans une vingtaine de langues.
- Les courts extraits de livres : 19/11/2007
VIVRE AVEC UN SQUELETTE EN SOI
La philosophie, l’art et la religion existent parce que la mort oblige les hommes a inventer des parades pour ne pas avoir a succomber et a trembler d’effroi devant elle. La mort emportera chacun de nous, elle a pris ceux qui nous ont precedes, elle n’epargnera pas les suivants – question de temps. Cette verite d’evidence travaille consciemment ou inconsciemment le corps et l’ame de tous depuis toujours : comment vivre avec un squelette en soi ? De quelle maniere accepter l’ineluctabilite, sous le regard d’un etre aime, des orbites vides et creuses un jour rempli de terre ? Et derriere ce sourire, des dents apres-demain en farandole plantees dans une machoire desarticulee au fond d’un cercueil pourri ? Dans l’incroyable fait du premier cadavre, la religion a puise ses sucs noirs et amers.
La religion a travaille l’humanite depuis ses premieres heures : de la simplicite animiste d’une poignee d’individus agenouilles devant le soleil de Lascaux aux rhetoriques absconses de la theologie negative universitaire, en passant par les formes triviales des trois religions monotheistes, l’intelligence fonctionne a plein regime pour repondre a cette seule question : comment vivre avec la mort, malgre elle ? D’ou une serie d’interrogations associees et consequentes : que peut-on esperer d’un futur proche, ou eloigne, avant elle et apres elle ? Pourquoi, pour qui, pour quelles raisons doit-on disparaitre un jour ? Peut-on la conjurer, la tromper, y echapper ? Y a-t-il a l’origine de cette fatalite une cause, un genre de faute, de peche, une espece de geste malheureux ?
Les hommes se tuent en speculations toutes plus vaines les unes que les autres pour eviter la seule reponse possible : la mort existe selon le seul ordre des lois de la nature, elle est necessaire a la vie pour sa duree, sa repetition, sa continuation sur le theatre planetaire. Vitalite, reproduction, duree de l’espece, sante, puissance et energie du principe a transmettre, l’alphabet biologique triomphe aveuglement en dehors de toute consideration morale. La cessation d’une vie ici, parce qu’epuisee, fatiguee, moins performante, usee, amoindrie, rend possible une autre vie la, neuve, fraiche, active, dynamique, efficace, insolente. Le cadavre laisse place au foetus, la naissance a besoin d’un espace vital degage par un deces. Les lois qui regissent la disparition des macaques dans la foret vierge coincident tres exactement avec celles qui president indistinctement a l’effacement des hommes sur la planete.
Etrange, il faut sans cesse dire et redire ces evidences ontologiques quasi grossieres tant elles devraient proceder du simple bon sens. Curieux, on s’attire l’oeil mauvais de ceux qui ne veulent pas entendre ces lapalissades metaphysiques et rendent l’annonceur de la mauvaise nouvelle responsable de son contenu. Bizarre, peu d’individus acceptent ces conclusions primaires, avant d’en tirer matiere a vivre et lecons existentielles. Incomprehensible cet acharnement de la plupart, qui se disent athees, a vivre avec le religieux cheville visceralement au corps. Etonnant cet art du plus grand nombre a vivre a genoux, incapables d’une station debout devant la mort, raides et droits dans leur squelette…