Auteur : Jean-Yves Cendrey
Date de saisie : 03/07/2008
Genre : Romans et nouvelles – francais
Editeur : Ed. de l’Olivier, Paris, France
Collection : Litterature francaise
Prix : 18.00 / 118.07 F
ISBN : 978-2-87929-602-9
GENCOD : 9782879296029
Sorti le : 06/03/2008
L’Alinea (Martigues)Dialogues (Brest)Durance (Nantes)Maison du livre (Rodez)Mollat (Bordeaux)Ombres Blanches (Toulouse)Sauramps (Montpellier)Thuard (Le Mans)
- Les presentations des editeurs : 07/03/2008
Jean-Yves Cendrey regle definitivement ses comptes avec son enfance et liquide l’heritage familial dans ce roman violent et caustique. Au centre de ce jeu de massacre, la manman et son amant, un homme quelconque, eleveur de pigeons a ses heures et admirateur fanatique de Pompidou. Et leur ennemi intime, l’auteur lui-meme, le fils salaud qui s’entete a ecrire des livres accusateurs clouant au pilori le couple adultere.
Jean-Yves Cendrey disseque avec une rage froide ces existences vouees a la mediocrite et a la chute dans les eaux glacees du calcul egoiste.
Jean-Yves Cendrey a publie plusieurs romans aux editions P.O.L. (Principes du cochon, Les morts vont vite, Trou-Madame), puis aux Editions de l’Olivier [Les Petites Soeurs de sang, Une simple creature). Avec Les Jouets vivants, suivi des Jouissances du remords, il initiait le cycle autobiographique que ce nouveau roman acheve. Il vit aujourd’hui a Berlin avec sa femme et leurs trois enfants.
- La revue de presse Xavier Houssin – Le Monde du 4 juillet 2008
C’est une mauvaise graine poussee en mauvaise terre. On a beau l’arracher, la bruler, il reste des racines. Et sans cesse elle revient plus drue et plus coupante. On ne se debarrasse pas si vite de certaines enfances. Les coups, les cris, la peur qui tord le ventre, l’abandon, les mots tus et les moments mures. De ses souvenirs violents, Jean-Yves Cendrey nous tire une oeuvre vengeresse. La douleur fait le pont du present au passe. Eaux troubles, glauques, profondes…
Mais qu’y a-t-il a comprendre ? Carnet de bord des amours de trente-trois ans d’un couple illegitime, le livre est aussi le recit d’une intense revolte et d’un immense chagrin tordu en ridicule, peinturlure de grotesque en tragique…
Autobiographie au miroir deformant, La Maison ne fait plus credit est un livre terrible qui n’epargne personne. S’y exprime cependant une vraie innocence. Cendrey nous fait le loup avec des dents de lait.
- Les courts extraits de livres : 07/03/2008
Je n’avais jamais ete fou, c’est la premiere fois. J’ai bien sur une bonne raison d’etre fou, mais ca n’est pas la premiere fois que j’en ai une. Je suis comme tout le monde, et plus d’une fois dans ma vie j’ai cru devenir fou.
Devenir fou, je l’ai cru tres vite apres mon mariage, en prenant conscience que je n’aimais pas ma femme qui me supportait mal. J’ai alors regarde autour de moi, et constate qu’on ne devenait pas fou pour si peu, alors je ne le suis pas devenu.
Devenir fou, je l’ai cru de nouveau quand notre fille unique m’a fait tous les reproches du monde, des plus sordides aux plus insenses, m’a dit que je ne la verrais plus et que je ne connaitrais jamais mes petits-enfants. Comme elle a tenu parole, je lui ai toujours refuse le plaisir de me rendre fou avec sa folie de persecution et ses decisions folles.
Etre devenu fou, et meme fou furieux, je l’ai bien cru le jour ou j’ai compris que ma femme ne mourrait jamais de sa maladie mortelle, qu’elle me tiendrait jusqu’a ma mort avec son agonie. Me croyant fou, je me suis dit de la laisser crever, tout increvable qu’elle etait, je me suis dit de me tailler, de refaire ma vie ailleurs avec ma maitresse. Et en fait je me trompais, je n’etais pas fou. L’evidence en est que trente-trois ans plus tard je me partage toujours entre ma vieille maitresse et ma femme mourante.
Ma femme mourante n’est pour rien dans ma folie presente. Ma vieille maitresse n’y est pour rien non plus, sinon qu’elle est la manman de celui qui a reussi a me rendre fou, l’aine de ses deux garcons, le mauvais, l’ignoble ecrivain, le fils salaud.
A cinquante ans le fils salaud est encore pire que lorsqu’il etait adolescent, quand il a commence a vouloir me rendre fou. J’aurais jure qu’il n’y parviendrait pas, ses provocations s’etant toujours brisees contre ma resignation. Et voila pourtant que je cede a la folie de raconter des horreurs authentiques, de pures abjections filiales, l’atroce histoire d’un fils salaud qui aurait prefere naitre d’un cadavre de chevre plutot que de sa manman, boire au pis pourri d’une chevre plutot qu’au sein de sa manman, baiser de la vermine au cul d’une chevre plutot qu’embrasser sa manman pour la nuit. Voila que je veux venger la manman d’avoir accouche d’un monstre d’ingratitude. Voila que je defie le prosateur sur son propre terrain, le couteau a la main.
Comment dire ?
Car la manman est malheureuse, du moins elle aurait motif de l’etre, et si elle ne l’est pas c’est par distraction. Le fils salaud l’a injustement punie du jour au lendemain. Elle etait grand-mere et il l’a licenciee. Elle etait sa mere et il l’a envoyee aux fraises en plein hiver, avec defense de revenir jamais. Moi que ma fille a envoye aux fraises et interdit de sejour, je sais ce que c’est. Seulement j’ai la chance de ne connaitre mes petits-enfants qu’en photos. Cette chance la manman ne l’a pas eue. Elle voyait ses petits-enfants et elle ne les voit plus depuis des annees, meme en photos. Ils ne lui telephonent pas, ils ne lui ecrivent pas. C’est d’autant plus dur que la manman n’est meme pas certaine que c’est son salaud de fils qui les en empeche. Ce sont des petits-enfants a chasser de son esprit. La manman s’y emploie, qui a renonce aux cartes d’anniversaire et surtout a envoyer des sous a des petits-enfants pareils. Tous les petits-enfants aiment recevoir des sous de leur grand-mere. Quand on aime recevoir des sous il faut ecrire a sa grand-mere pour Noel, c’est un minimum. Sans cela on ne doit pas se plaindre de ne rien recevoir, ni a son anniversaire ni a Noel. Mais la manman n’est meme pas certaine d’avoir des petits-enfants qui s’en plaignent.