Auteur : Gerard Da Silva
Date de saisie : 04/12/2008
Genre : Religion, Spiritualite
Editeur : Syllepse, Paris, France
Collection : Histoire, enjeux et debats
Prix : 22.00 / 144.31 F
ISBN : 978-2-84950-186-3
GENCOD : 9782849501863
Sorti le : 04/12/2008
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- Le courrier des auteurs : 18/12/2008
J’ai decouvert, il y a quelques annees, une affaire qui fut mondialement connue et desormais oubliee, l’affaire Mortara. Mon premier mouvement fut de songer a cet enfant ce 6 ans, enleve a ses parents, le 23 juin 1858, a Bologne, par les autorites catholiques, au motif qu’il aurait ete baptise chretien par une servante et ne pourrait demeurer dans une famille juive. Puis j’ai constate, que cette affaire italienne etait, en fait, bien francaise, car les troupes de Napoleon III etant dans les Etats pontificaux, a l’epoque, il suffisait d’envoyer quelques soldats en la Maison des catechumenes a Rome, ou etait sequestre l’enfant et de le rendre a ses parents. Plus singulier encore, aucun auteur francais n’avait ecrit le moindre livre sur l’affaire. Ayant convaincu les editions Syllepse de l’interet de l’affaire Mortara, il ne me restait plus qu’a ecrire un livre paraissant en 2008, pour une veritable commemoration. J’ai lu toute la presse de l’epoque, jusqu’a l’interdiction, par la censure imperiale, d’en parler, fin 1858 et examine l’ensemble des arguments, tant des defenseurs des droits de la famille Mortara, que de ceux qui justifient l’enlevement. Le principal argument de ces derniers est la doctrine catholique du bapteme. Or son examen montre qu’elle a ete fort divergente au cours des siecles. En revanche, la lecture des textes du IVe siecle a 1965, ne laisse aucun doute quant a la constance de l’antisemitisme chretien, cause veritable de cet enlevement. Et du fait que le petit Edgardo sera fait pretre et jamais rendu a ses parents. Au demeurant, il y eu d’autres affaires similaires, affaire Montel en 1840, Coen en 1864, Finaly en 1953. Le Code canonique de 1983 pretend toujours que le Vatican peut baptiser des enfants, y compris contre l’avis des parents. Ce qui m’a conduit a parcourir les chemins de la memoire historique, afin de comprendre comment a ete fabrique l’oubli de cette retentissante histoire.
Et je reviens, au scandale premier, a l’origine du livre : l’enlevement, en toute impunite, d’un enfant de six ans, arrache aux siens. 150 ans apres, cela merite bien un livre…
Gerard Da Silva
- Les presentations des editeurs : 18/12/2008
Le 23 juin 1858, a Bologne, Edgardo Mortara est enleve a ses parents. Les coupables du rapt assurent agir au nom du pape Pie IX, et que, cet enfant juif, etant considere chretien par les autorites catholiques, il ne peut rester plus longtemps parmi des juifs. En depit des protestations des parents, leur fils leur est envoye a Rome ; on en fera un pretre, pret a tenter de convertir sa mere. Regulierement, le Vatican encourageait de tels enlevements. Mais, pour la premiere fois, la protestation des parents va devenir une campagne internationale. Le debat est particulierement vif en France. Or, s’il y eut des livres en italien et anglais sur cet acte odieux, le present ouvrage est, pour les cent cinquante ans de l’affaire (2008), le premier livre ecrit en francais. Il etudie trois autres affaires comparables : les affaires Montel (1840), Coen (1864) et Finaly (1953). Il est montre que le Code canonique de 1983 pretend toujours que l’Eglise catholique peut baptiser tous les enfants, y compris contre l’avis des parents. Cette pretention est, en fait, une consequence de l’absolutisme fondateur du christianisme, dont les caracteristiques sont egalement etudiees, ainsi que son caractere foncierement antisemite.
Cette affaire, dont l’oubli fut organise, a connu un nouveau debat, en 2000, lorsque Jean-Paul II decida de beatifier le pape antisemite des affaires Mortara et Coen. Comment le Vatican a-t-il pu proceder, et avec quels soutiens et alliances, c’est l’ultime question etudiee.
Gerard da Silva est titulaire de deux doctorats es lettres, specialiste d’histoire du catholicisme et de la laicite. Il a publie Le texte et le lecteur (L’Harmattan, 1985) et, en tant que coauteur, Contre Benoit XVI. Le Vatican, ennemi des libertes (Syllepse, 2006).
- Les courts extraits de livres : 30/12/2008
Extrait de l’introduction :
Parce que, jargonnant vepres, jeune et vigile,
Exploitant Dieu qui reve au fond du firmament,
Vous avez, au milieu du divin evangile,
Ouvert boutique effrontement.
Victor Hugo, A des journalistes en robe courte
Il y a cent cinquante ans, le 23 juin 1858, un enfant est enleve a ses parents. L’enlevement est un crime condamne par le Code penal, a l’epoque comme aujourd’hui. Or les criminels ne seront pas condamnes, ils ne seront pas meme poursuivis. Alors que, pour le meme crime, en ces memes annees, les criminels sont condamnes a la reclusion. Qui sont ceux la qui peuvent arracher, en toute impunite, un enfant a ses parents et ne jamais le leur rendre ? Le criminel se nomme Pie IX, auquel la catholicite donne le nom de pape. Les victimes sont les Mortara, honorable famille de Bologne, laquelle, a l’epoque, fait partie des Etats dits pontificaux. Les Mortara sont juifs; tel est, pour le Vatican, ce qui justifie qu’il leur enleve Edgardo, garconnet de 6 ans. La position des autorites catholiques (Inquisition comprise) est que, encore nourrisson, donc six ans plus tot (l’enfant est ne le 25 octobre 1851), il aurait ete baptise par une servante des Mortara, catholique et mineure, puisqu’agee de 14 ans. Sur les seuls dires tardifs et incontrolables de cette servante, le Saint-Office va considerer le bapteme comme valide et faire enlever l’enfant, au motif qu’un enfant chretien ne peut demeurer dans une famille juive. Il en sera fait un pretre, entrant le 17 novembre 1867 au seminaire dans l’ordre des chanoines reguliers du Latran; il fera sa premiere predication publique le 25 novembre 1874, a Poitiers. Il en fera de meme en 1878, a Perpignan, et rencontrera sa mere, qu’il songera, en vain, a convertir a la foi de celui qui est le padre Pio Mortara (Pio en l’honneur de son pere, le pape Pie IX).
Le pape Pie IX, en fonction depuis 1846, plutot liberal au debut de son pontificat, est desormais un champion de l’opposition a la democratie et aux idees nouvelles; detestation dont il fera une synthese liberticide avec son Syllabus de 1864. Durant la periode revolutionnaire de 1848, qui mit un terme a la fiction selon laquelle le pape devait beneficier du privilege d’un Etat et relever de deux ordres (le temporel et le spirituel), Pie IX avait choisi son salut dans la fuite, soit a Gaete, du 29 octobre 1848 au 12 avril 1850. Ce sont les armees francaises du Second Empire qui sont censees assurer sa sauvegarde en ses Etats retrouves (les troupes autrichiennes etant en Romagne). C’est dire que l’affaire Mortara est necessairement une question francaise.