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Le bal defendu

Couverture du livre Le bal defendu

Auteur : Michel Morcrette

Date de saisie : 15/02/2007

Genre : Romans et nouvelles – francais

Editeur : Flammarion, Paris, France

Prix : 18.00 / 118.07 F

GENCOD : 9782081200517

Sorti le : 02/02/2007

  • Les courtes lectures : Lu par Emma Barcaroli – 13/03/2007

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Emma Barcaroli – 13/03/2007

  • Les presentations des editeurs : 16/02/2007

Le 29 septembre 1935 on attendit vainement Clara Pradier au Meistersaal. Une salle bourdonnante qui gardait les yeux fixes sur le grand rideau rouge, a l’affut des nouvelles. Enfin, un homme en frac fit irruption sur la scene pour annoncer, sans autre explication, que le concert etait annule. Il se fit un remue-menage de fauteuils et de partitions refermees, puis la foule se repandit sur l’esplanade et se fondit dans les rues ou palpitaient les lampadaires. Dans la garde-robe de sa chambre on ne trouva qu’une robe, sa robe de concert, un long fourreau de soie noire, suspendue a un cintre.

Apres avoir ete responsable du service litteraire des PUF, Michel Morcrette a dirige Hachette Litterature et Armand Colin de 1988 a 2001. Il est directeur editorial des editions Belin et l’auteur d’un premier roman, L’Etrangere, publie par Francoise Verny (Flammarion, 1988).

  • Les courts extraits de livres : 16/02/2007

Si je passais plus de temps sous la table d’harmonie qu’aupres du clavier, c’est que je ne supportais pas la discipline que ma mere voulait m’imposer. Je jouais d’instinct sans avoir rien appris et reproduisais sans hesitation les melodies que j’avais entendues, ne fut-ce qu’une seule fois. Les amis de mes parents s’etonnaient de mes dons d’oreille et de doigte. Voila de quoi decider mon grand-pere a inviter Nadia Boulanger qui venait d’obtenir le deuxieme grand prix de Rome et enseignait au Conservatoire de Paris. C’etait une jeune femme, rondelette, avec un chignon en forme de brioche et des petites lunettes posees de travers sur son nez, qui tressauterent drolement tout le temps qu’elle joua une sonatine de Mozart. Je me mis a mon tour au piano et interpretai le morceau d’une traite, puis je le repris en le transposant. Nadia, a la difference des autres, ne m’applaudit pas, mais, apres s’etre pince les levres plusieurs fois, accepta de me prendre comme eleve. De maniere tout a fait exceptionnelle, car j’allais sur mes six ans et elle ne s’occupait pas des enfants de mon age. Le calvaire commenca. Une fugue et une sonate a apprendre chaque semaine. La memoire et la volonte, disait Nadia, sont les cles du pianiste. Les exercices, veritable toilette des doigts, a travailler chaque jour a vitesse differente, la barre d’elevation pour developper l’independance des mains et les bagues plombees pour ameliorer la velocite et la delicatesse d’attaque. Et toujours des regles : Cesse de travailler des que tu te surprends a revasser. Ne regarde jamais tes mains ni le clavier. Tes yeux doivent rester fixes sur la musique.
Je m’en fichais pas mal. Des que je quittais l’appartement de Nadia, je m’arretais dans la librairie de mon pere, rue de l’Odeon. Je m’installais dans un coin, entre deux piles de livres – je revois encore son regard intrigue et les clins d’oeil qu’il me faisait pendant qu’il servait les clients – et je m’amusais a incliner la partition de droite et de gauche. D’un coup, c’etaient des pelotes de ficelle, des couronnes, des bateaux a voiles, du linge suspendu a de grosses, epingles qui surgissaient de la portee.