Auteur : Jiang Rong
Traducteur : Lisa Carducci | Hansheng Yan
Date de saisie : 27/03/2008
Genre : Romans et nouvelles – etranger
Editeur : Bourin editeur, Paris, France
Prix : 25.00 / 163.99 F
ISBN : 978-2-84941-081-3
GENCOD : 9782849410813
Sorti le : 31/01/2008
- Les presentations des editeurs : 27/01/2008
C’etait la premiere fois que Chen Zhen traversait la steppe en cavalier solitaire : il ne s’etait pas rendu compte du danger qui l’attendait. Mais il etait deja trop tard pour rebrousser chemin. Soudain, le jeune homme faillit tomber de sa monture en voyant, a quarante metres devant lui, une horde de loups dont le pelage etincelait sous la derniere lueur du soleil. Plus de trente betes se tenaient la dont certaines avaient la taille d’un leopard. Au milieu tronait le roi des loups, reconnaissable a la fourrure blanchatre qui, sur sa poitrine et son ventre, brillait d’un eclat de platine. Tout en lui respirait la puissance de son rang. A un signal connu d’elle seule, la meute s’etait levee d’un bond. La queue raidie a l’horizontale, les loups s’appretaient a s’elancer et a s’abattre sur leur proie comme autant de fleches projetees d’un arc bande.
Vendu en Chine a plus de vingt millions d’exemplaires, Le Totem du Loup est un fascinant roman d’aventures. Mais c’est aussi le recit d’une initiation, celle de Chen Zhen, jeune etudiant chinois qui doit apprendre, au contact des tribus mongoles, comment survivre… Les hordes de loups regnent encore sur la steppe. Les cavaliers nomades, heritiers de Gengis Khan, craignent et venerent cet animal qu’ils ont choisi pour embleme. La rencontre avec cette culture va bouleverser le jeune Chinois. Il sera d’autant plus ebranle que cet univers qui le seduit tant est sur le point de disparaitre…
Jiang Rong (pseudonyme) est ne en 1946 dans une famille de militaires. En 1967, il est volontaire pour aller vivre en Mongolie interieure. En 1978, il retourne a Pekin pour achever ses etudes et enseigne aujourd’hui les sciences politiques et sociales. Comme son heros Chen Zhen, Jiang Rong a passe onze ans sur la steppe pendant la Revolution culturelle en compagnie des Mongols et des loups. La decouverte de cette nature sauvage, du mode de vie des Mongols et de leur histoire n’a cesse de le hanter.
Roman traduit du chinois par Yan Hansheng et Lisa Carducci Edition francaise etablie par Boris Martin
- La revue de presse – Paris-Match du 27 mars 2008
Son roman est d’abord un hymne ecologique plein de paysages grandioses et enneiges ou les nomades mongols elevent moutons et chevaux. Chen Zhen, son heros, est un etudiant venu de la ville qui se passionne pour la relation ancestrale de l’homme et du loup. Des amis mongols lui font decouvrir l’extreme intelligence de ces predateurs, dont l’habilite a la chasse aurait inspire Gengis Khan ! Mais, en quelques annees, la planification imposee par Pekin elimine les loups et amene les eleveurs mongols a se sedentariser en devenant agriculteurs. Ils perdent des lors l’esprit du loup, a savoir un mode de vie libre. Dans la Chine d’aujourd’hui, les reactions au livre de Jiang Rong n’ont pas manque. Aux yeux des communistes conservateurs, s’inspirer de cet animal sauvage mene tout droit au fascisme. A l’inverse, des grands patrons d’entreprise ont distribue le livre a leurs employes pour developper leur esprit d’initiative. L’auteur observe tout cela en feignant le detachement, mais il se verrait bien dans la position de ces ecrivains francais des Lumieres dont les ecrits ont prepare la Revolution de 1789.
- La revue de presse Mohammed Aissaoui – Le Figaro du 13 mars 2008
…le livre puise sa force dans le fait que c’est aussi une superbe fable sur la liberte. Car, a travers cette histoire de loups menaces et le recit de la vie des nomades mongols, c’est surtout le regime chinois et sa philosophie qui sont vises par cette metaphore. Enfin, et cela a l’air d’avoir beaucoup plu aux lecteurs, le roman peut s’apprecier comme un guide strategique, une sorte d’ Art de la guerre emprunte au systeme de survie des loups. Le livre est traduit du chinois par Yan Hansheng et Lisa Carducci. Francois Bourin a ete le premier a le publier hors de Chine.
- La revue de presse Francois Busnel – L’Express du 21 fevrier 2008
Enorme best-seller en Chine, Le Totem du loup debarque en France…
Le Totem du loup est un veritable brulot. Il suffit de laisser de cote l’intrigue, basique, pour se concentrer sur les quelques phrases qui derangent et comprendre aussitot que cette histoire de loups et de moutons remet en question les fondements memes du regime chinois : le confucianisme, l’esprit strategique de Sun Zi, le communisme pur et dur… bref, tout ce qui fait le socle de la Chine contemporaine est purement et simplement recuse avec un talent fou et une incroyable force de persuasion…
Pourquoi tant d’enthousiasme ? C’est que Jiang Rong est le La Fontaine chinois…
Au prestigieux poete francais, dont il a lu les oeuvres lorsqu’il etait etudiant, alors qu’il se plongeait avec delectation dans des livres interdits (J’ai devore Le Rouge et le Noir, le Contrat social et Jean-Christophe : ce fut mon eveil politique et sensuel, raconte-t-il aujourd’hui), Jiang Rong emprunte la methode : ne jamais attaquer le pouvoir politique de front, mais le ridiculiser par une fable dont les animaux sont les heros…
Les Chinois, dit-il en substance dans son roman, ne sont que des moutons. S’ils veulent se liberer du joug qui les oppresse, ils doivent apprendre a se comporter comme des loups.
- La revue de presse Pascale Nivelle – Liberation du 7 fevrier 2008
Le livre ne passe pas inapercu. Pave de plus de 400 pages a la couverture percee de deux yeux phosphorescents, il s’est deja vendu a 2,6 millions d’exemplaires en Chine, auxquels s’ajoutent 15 millions de copies pirates parfaites. En tete des ventes pendant plus de deux ans, rivalisant avec Harry Potter, il a obtenu en novembre le premier prix Man de litterature asiatique, finance par le groupe britannique deja sponsor du celebre Booker Prize…
Le Totem a aussi mis en rage l’aile encore bien vivace des caciques du Parti, qui a tente de s’opposer a la publication. Qualifie de fasciste par des sinologues patentes, d’antipatriote par les conservateurs furieux d’etre traites de moutons, il a cependant passe la censure. Depuis quatre ans, malgre les prix litteraires et la reconnaissance internationale, il continue de nourrir des theses universitaires et une controverse sans fin sur Internet. Un debat a l’image de la Chine actuelle…
Le Totem du loup sera sa contribution a la politique de reforme et d’ouverture lancee par Deng Xiaoping, a laquelle il croit dur comme fer malgre les brimades qu’il continue de subir. Pas un moment je n’ai pense me refugier en Occident, dit-il, soudain tres anime. J’ai voulu continuer a me battre pour faire evoluer le regime. Au fond de lui-meme, l’ancien garde rouge est reste communiste. Comme les grands patrons d’entreprise qui dirigent la Chine d’aujourd’hui. Le Totem du loup est leur epopee, autant que celle des nomades mongols engloutis.
- Les courts extraits de livres : 27/01/2008
Chen Zhen decouvrit soudain a l’extremite de sa longue-vue un enorme loup dont les yeux semblaient le transpercer. Immediatement, il eut la sensation qu’on lui lacerait sa chemise, et un long frisson secoua tout son corps. Il percut la sueur exsudee par chacun de ses pores et sentit ses poils se dresser, raides, comme les piquants d’un porc-epic.
Malgre les deux annees passees dans la steppe mongole et la presence du vieux Bilig a ses cotes, sa peur des loups ne l’avait pas quitte. Loin de leur camp, isoles en pleine montagne dans cette cachette enfouie sous la neige, les deux hommes se trouvaient face a une meute. Bilig et lui n’avaient pour se defendre que deux batons : pas un fusil, ni un sabre, ni une perche a lasso, pas meme une paire d’etriers, pas le moindre objet en fer pour repondre a un eventuel assaut. Si par malheur la meute flairait l’odeur de l’homme, ils deviendraient la proie de l’inhumation celeste. Irrevocablement, et avant terme.
Chen respirait a peine, tant il tremblait. Il voyait presque frissonner son haleine avant qu’elle ne se transforme en givre. Il se tourna vers Bilig qui, de sa longue-vue, scrutait les loups tapis en cercle.
– Non, ne tremble pas ! Es-tu aussi faible qu’un mouton ? Vous, les Han, vous avez la peur du loup dans la moelle. C’est pourquoi dans la steppe vous etes toujours battus, murmura le vieux chasseur.
Comme Chen Zhen ne disait rien, il ajouta rudement :
– Ne t’affole pas ! Au moindre bruit, ce serait la catastrophe.
Chen Zhen acquiesca d’un hochement de tete. Il prit une poignee de neige, la serra si fort entre ses doigts qu’elle devint une boule de glace.
Devant eux, sur la pente, un attroupement de pres d’un millier de gazelles broutait. Elles fouillaient de leurs pattes anterieures la couche de neige afin d’exhumer les herbes ensevelies. Quelques males, tout en machant, observaient les alentours, tete relevee, humant longuement l’air, le flair aiguise. Mais ils n’avaient toujours pas vu les loups qui s’appretaient a les prendre en tenailles. Chen Zhen se figea, comme si la boule compacte qu’il serrait avait transmis a son corps tout entier sa froideur, le transformant en statue de glace. C’etait la deuxieme fois qu’il rencontrait une meute de loups aussi importante dans la steppe.
Deux ans auparavant, quand Chen Zhen avait quitte Pekin pour s’installer dans ce paturage pres de la frontiere, c’etait la fin de novembre et la steppe Olon Bulag s’etait deja couverte d’un manteau blanc. Les jeunes instruits, ces etudiants venus comme lui de Pekin, ne s’etaient pas encore vu attribuer leurs yourtes. Chen Zhen, qui s’appretait a devenir berger, logeait alors provisoirement chez Bilig. Un mois plus tard, il avait accompagne le vieux Mongol au siege de l’administration de la ferme, a quarante kilometres de la. Ils devaient recuperer des documents d’etude et acheter differents objets pour le quotidien. Leur mission accomplie, les deux hommes s’appretaient a rejoindre leur camp lorsque le vieux Bilig, en sa qualite de membre du comite revolutionnaire, avait ete retenu par une reunion. Chen Zhen avait du rentrer seul. Bilig lui avait cede sa propre monture, un grand cheval noir, tres rapide, qui connaissait la route. Au moment de se separer, le vieux Mongol avait reitere sa recommandation :
– Il ne faut en aucun cas prendre un raccourci, mais suivre fidelement le grand chemin ou il y a des yourtes tous les dix ou quinze kilometres. Ainsi, tu seras en securite.
Une fois sur le cheval de Bilig, Chen Zhen avait senti toute la force des meilleurs coursiers mongols. L’envie lui avait pris d’accelerer l’allure. Il avait grimpe au faite d’une colline et apercu aussitot le tertre Chaganuul ou s’etalait sa brigade de production. Il en avait oublie la recommandation du vieux Bilig et abandonne la voie que celui-ci lui avait conseillee pour s’engager sur une piste qui lui epargnerait une dizaine de kilometres.
A mi-chemin, le disque frileux du soleil s’etait eclipse derriere l’horizon. Un air glacial etait monte de la neige. Le manteau de fourrure de Chen, devenu rigide, crissait a chaque mouvement de ses bras. Le cheval, couvert d’une sueur qui se condensait en une pellicule de givre, s’etait mis a ralentir a mesure que la neige se faisait plus epaisse. Devant eux, ondulaient des collines duveteuses formant un vaste desert blanc, vierge de toute presence humaine. Malgre ses efforts, le cheval ne semblait pas fatigue; il trottinait a une allure raisonnable. Soudain, Chen Zhen avait tressaute, saisi par une sourde angoisse. Il avait eu peur de s’egarer ou d’etre surpris par la tempete et de mourir dans cet univers de neige et de glace. Affole, il avait passe en revue les plus terribles eventualites. Ou presque.