- Le choix des libraires : L’histoire d’un mariage (2 choix)– Andrew Sean Greer – Ed. de l’Olivier, Paris, France– 14/07/2012
Kentucky. Adolescente, Pearlie tombe amoureuse au premier regard d’Holland Cook, un jeune homme d’une grande beauté. Séparés par la guerre, ils se retrouvent, par hasard, à San Francisco et se marient. Ils ont un fils, Sonny. Tout semble aller bien. Et Pearlie oublie les deux vieilles tantes de Holland, deux vieilles filles cancanières, qui avaient essayé de la mettre en garde avant ses fiançailles “- Il est vraiment malade. Il n’y a pas de remède” – allant même jusqu’à lui dire : «Ne faites pas ça ! Ne vous mariez pas avec lui» Quatre années de mariage heureux se sont écoulées lorsqu’un inconnu se présente à la porte «Bonjour, madame, j’espère que vous pouvez m’aider». À partir de ces mots banals tout va changer. Cet inconnu c’est Charles Drummer, un homme qui a bien connu Holland durant la guerre.
Je ne vous en dirai pas plus. Juste la première phrase : “Nous croyons connaître ceux que nous aimons”.
Attendez-vous à une lecture ponctuée de coups de théâtre, de surprises, et ce jusqu’à la toute dernière page…
En toile de fond le conflit de 39-45, pas celui des combattants mais celui des planqués, des objecteurs de conscience, et l’Amérique des années 1950 marquée par la guerre de Corée, le maccarthysme, l’exécution des Rosenberg, la ségrégation raciale.
Un roman d’amour original très prenant, fertile en rebondissements.
- Le choix des libraires : La voie ferrée (2 choix)– Olivier Deck – Editions In8, Serres-Morlaàs, France– 14/07/2012
“Gaspar était le dernier habitant du plateau des carrières. S’il mourait, qui s’en apercevrait ? Même le facteur ne montait plus chaque jour, et encore, Gaspar ne l’avait pas vu depuis au moins une semaine.”
Gaspar avait continué, avec son cheval, à entretenir la voie ferrée qui reliait le plateau au bourg, plus d’un an après le passage du dernier train. C’est son grand-père qui avait inauguré la ligne aux commandes de la première machine à vapeur, ensuite son père avait été le conducteur de la dernière motrice à gasoil. Et puis un jour Gaspar renonce : “À quoi bon s’esquinter ? Plus personne ne profitait de son travail, et après lui, qui prendrait soin des rails ? Tout finirait sous la terre et les herbes.”
Pour l’heure Gaspar et son cheval sont partis au lever du jour. Ils vont au village, chez Léon, qui ferme à six heures. S’agit pas de traîner.
L’histoire d’un homme dont l’existence va être bouleversée. Tout comme son lecteur.
Une belle découverte, comme ça, par hasard, au milieu de livres bien plus épais, bien plus pesants, bien moins émouvants.
- Le choix des libraires : Clair-obscur (2 choix)– Nella Larsen – Climats, Paris, France– 14/07/2012
Quelques mots sur l’auteur. Nella Larsen est née à Chicago en 1891 d’une mère blanche et d’un père noir qui ont divorcé avant sa naissance. La ségrégation raciale lui interdit alors, notamment, de s’asseoir à côté de sa mère dans un autobus. Études à l’université noire de Nashville. Infirmière puis bibliothécaire, elle épouse un brillant scientifique noir, Elmer Imes et s’établit à Harlem devenant une des figures de proue de la «Renaissance de Harlem». Elle publie deux romans (“Quicksand”, 1926 et “Passing”, 1929) qui lui valent une reconnaissance immédiate. En 1964 au terme d’une longue dépression, elle est retrouvée morte dans son appartement.
“Passing”, classique des lettres américaines, est pour la première fois traduit en français.
Nous sommes à Chicago en 1927. Un jour de très forte chaleur, deux amies d’enfance, Irène Redfield et Claire Kendry se retrouvent sur la terrasse du Drayton, un hôtel réservé aux blancs. Tout les sépare, hormis le fait d’être noires et d’avoir une complexion de peau assez claire pour pouvoir «passer» pour blanches. Claire a épousé un riche blanc raciste qui hait les «nègres» et veut ignorer le secret de sa femme. Irène, mariée à un noir, mère de deux fils dont l’un est «foncé», mène une vie mondaine et intellectuelle intense dans les cercles noirs de Harlem. Claire est taraudée par un désir «Tu ne sais pas, tu ne peux pas comprendre à quel point je veux voir des Noirs, les fréquenter de nouveau, leur parler les entendre rire» C’est autour de cette volonté de «retour» que se construit le roman. Brian, le mari d’Irène constate que les Noirs qui «passent» après un temps reviennent toujours et, à sa femme qui se demande pourquoi, il répond : «Si je le savais je saurais ce que c’est qu’une race» Claire va peu à peu s’immiscer dans la vie bien réglée d’Irène, ce qui conduira au drame.
Un roman intense sur le désir d’appartenir, de s’identifier, de se libérer, précurseur de deux romans au moins que je recommande vivement : “Demi-teinte” de Danzy Senna (2004) et “La Tache” de Philip Roth (2002)
N.B. Passionnante préface de Laure Murat, à lire après avoir lu le roman.
- Le choix des libraires : Margherita Dolcevita (2 choix)– Stefano Benni – Actes Sud, Arles, France– 14/07/2012
Pianiste de jazz, auteur de chansons, de poèmes, de nouvelles et de romans, Stefano Benni a une imagination débordante et un talent confirmé de raconteur d’histoires. Son “Bar 2000” a été un de mes gros coups de coeur. Aujourd’hui je vous invite à suivre sa nouvelle héroïne, Margherita Dolcevita, une ado de quinze ans aux yeux bleus ensorceleurs, effrontée, idéaliste, qui danse bien malgré qu’elle ait un léger défaut au coeur et soit un peu trop enveloppée – elle a renoncé à perdre du poids “par crainte d’être ensuite stressée par la peur de grossir”. Elle se débrouille plutôt bien en classe, écrit des poèmes qu’elle qualifie de «vraiment loupés» mais voudrait devenir poétesse. Dans l’immédiat elle dialogue avec “le fantôme de la Petite Fille de poussière, sa douce et effrayante amie”, qui se cache dans les ruines d’une maison bombardée.
Dans sa famille il y a le grand-père qui a tout fait dans la vie : marin, vendeur d’oasis, homme-fromage dans les supermarchés. Persuadé que nous sommes envahis par les toxines et la nourriture avariée “il se mithridatise” : il habitue son organisme aux poisons en mangeant des yaourts périmés, des fromages moisis, de l’eau javellisée et en s’aspergeant d’insecticides… Le père retraité est aussi avocat “défenseur d’objets” : il passe son temps à retaper, réparer, remonter et remettre en marche des objets, convaincu qu’ils soufrent si nous nous en débarrassons et les remplaçons trop vite. La mère, assez bigote, ressemble à un “sachet de thé utilisé” ; excellente cuisinière, elle est “larmacro” et verse des torrents de larmes en regardant sans arrêt les mêmes épisodes d’une série télé : Eternal love. Elle a arrêté de fumer depuis des années mais fume toujours des “cigarettes virtuelles”.
Giacento, le frère aîné, dix-huit ans ressemble à sa soeur en crétin. Erminio, dit Eraclito, a douze ans. “Casse-couilles surdoué, sympa et terrifiant c’est la gâchette de jeux vidéo la plus rapide de l’Ouest”. Il y a enfin Roupillon, dit Roupi, un “chiencatalogue”.
Tous vivent des jours paisibles et plutôt heureux dans leur coin de campagne aux portes d’une petite ville comme tant d’autres. Jusqu’au jour où une bien étrange famille vient s’installer, juste en face de chez eux, dans une demeure ultramoderne en forme de cube noir, imposant et inquiétant, qui va bouleverser l’ordre tranquille des jours.
Une histoire racontée par une Zazie à l’italienne, pleine d’humour, de poésie, de suspens, de trouvailles, qui se savoure jusqu’à la dernière ligne.
- Le choix des libraires : Le fils de la mort (1 choix)– Adrian McKinty – Gallimard, Paris, France– 14/07/2012
En Espagne pour un match, même «amical» de foot entre anglais et irlandais, les hooligans font le voyage et s’affrontent brutalement. Le narrateur, Michael Forsythe, se trouve pris dans ces bagarres, lui qui cherchait à passer quelques jours tranquilles à l’abri du contrat mis sur sa tête cinq ans plus tôt par un des parrains de la Maffia irlandaise à New York pour avoir descendu l’un de ses proches. Le voici arrêté et risquant une lourde peine de prison puis une extradition vers le Mexique dont il a fui la justice.
Une agente des services secrets britanniques en charge de la lutte contre le terrorisme irlandais lui propose un marché contre sa liberté. L’IRA, en cette année 1997, est sur le point de parvenir à un accord de cessez-le-feu avec les forces armées britanniques. Michael est chargé d’infiltrer une cellule irlandaise en exil à Boston soupçonnée de vouloir lancer une campagne d’attentats à la bombe sur le sol américain dès l ?annonce du cessez-le-feu.
Michael va donc devoir se faire accepter par les «Fils de Cuchulainn», mériter leur confiance, participer à des attentats, informer les services secrets britanniques et résister aux charmes de Kit, la fille du vieux Gerry McCaghan, le patron du groupe, promise à un de ses lieutenants.
Du rythme, du suspens, de l’humour, des personnages forts en Guiness.
Le deuxième roman paru en série noire de l’auteur du “Fleuve caché” qui m’avait déjà procuré un vif plaisir de lecture.
N.B. : Adrian McKinty a grandi dans sa ville natale de Carrickfergus en Irlande du Nord. Il a été étudiant à Oxford, a échoué dans sa tentative de faire carrière dans le droit. Au début des années 1990 il a émigré aux Etats-Unis. Il vit aujourd’hui à Denver où il écrit des romans noirs, joue au rugby, se cuite et enseigne à mi-temps.
- Le choix des libraires : Les derniers Indiens (2 choix)– Marie-Hélène Lafon – Buchet Chastel, Paris, France– 14/07/2012
Eh bien oui Marie-Hélène Lafon le confirme avec ce nouveau roman elle est bien dans la lignée de Richard Millet – avec La Gloire des Pythre – et de Pierre Jourde – Pays perdu -, ces écrivains qui racontent la fin d’une certaine paysannerie, d’un certain mode de vie à la campagne. La fin d’un monde, d’une civilisation dans une silencieuse indifférence.
La vie quotidienne d’un frère, Jean, taiseux plein de rage rentrée et de sa soeur, Marie, qui vivent seuls dans leur ferme du Cantal, autrefois prospère, depuis qu’est morte leur mère vindicative et dévorante. “On ne va plus dans ces pièces du haut, on dort en bas, on vit en bas ; c’est assez grand, ça suffit, pour deux ( ?) Il tourne la tête, et, par la fenêtre de l’évier, il regarde la cour des voisins, de l’autre côté de la route goudronnée qui, autrefois, était un chemin de terre. Il dit qu’il ne regarde pas, mais elle le voit, elle le sait, il regarde”. Les voisins sont nombreux, ils vivent en tribu. Ils ont acheté, investi, construit. Ils se développent. Ont-ils oublié leur Alice retrouvée morte, trente ans plus tôt, dans les bois noirs ?
Un univers fermé, étouffant où la tension est incessante, décrit avec une remarquable économie de mots et d’effets et une justesse de ton, résultat d’un travail minutieux de façonnage et d’élagage de la langue.
- Le choix des libraires : Dans les veines ce fleuve d’argent (3 choix)– Dario Franceschini – Gallimard, Paris, France– 14/07/2012
Autant vous le dire de suite c’est une pépite comme on en découvre seulement de temps en temps et qui fait chaud au coeur.
Une première phrase énigmatique – Il avait toujours confondu le silence avec le froid – capte immédiatement l’attention. Tout comme la démarche de Primo Bottardi qui s’en va à la recherche de Massimo Civolani. Ce dernier, quarante années plus tôt, lui avait posé une question à laquelle il n’avait pas répondu. Durant son périple le long du fleuve, rencontres, souvenirs et sensations passés vont s’entremêler. Il se rappellera cette soirée avec Maria, devenue sa femme, durant laquelle ils découvrirent en un instant combien le bonheur tranquille de la tendresse était plus proche de l’amour que la joie étourdissante des passions, il voyagera sur la charrette d’Artioli qui lui racontera l’histoire des habitants de Borrello qui perdirent mystérieusement, dans les labyrinthes de leurs esprits, le repère de leur identité, il remettra à Meletti Carola un paquet de la part de son fils qui ne contient que de la paille, il retrouvera dans une auberge Ariodante, un magicien décrépi qui prédit l’avenir les jours de foire, il se rappellera, en croisant des lavandières, son frère, Secondo qui avait connu le parfum de savon de l’une d’entre elles, il écoutera Artioli lui raconter qu’il est marié depuis cinquante ans avec une femme qui ne le sait pas – il repensera à son grand-père qui lui a donné, sans le savoir, son amour pour les odeurs.
Et comme tout est réussi dans ce livre, même la quatrième de couverture, en voici un extrait : On a pu parler à propos de ce roman de «réalisme magique». La lenteur du voyage, le pittoresque des personnages, la douceur des rencontres et le sortilège de maints épisodes contrastent avec la silencieuse et obscure pression du destin que l’on sent peser sourdement et qui révèlera enfin son visage dans une scène inoubliable et foudroyante.
Un de ces romans qui vibre longtemps dans la mémoire du lecteur. Un livre que vous voudrez offrir à celles et ceux que vous aimez ; ils vous en seront vivement reconnaissants.
N.B. Dario Franceschini est né à Ferrare en 1958. Dans les veines ce fleuve argent a reçu en 2007 le prix Bacchelli et le prix du Premier Roman décerné à Chambéry. Il vient de publier en Italie son deuxième roman, La folie soudaine d’Ignazio Rando.
- Le choix des libraires : La fille du fossoyeur (2 choix)– Joyce Carol Oates – Philippe Rey, Paris, France– 14/07/2012
Dès la première scène j’ai su que je lisais un grand livre. Un après-midi de septembre 1959 une jeune ouvrière, Rebecca Tignor, suit un chemin de halage pour rentrer chez elle. Elle se sent suivie, à une dizaine de mètres, par un homme coiffé d’un panama. Que de choses se passent dans la tête de Rebecca jusqu’au moment où l’homme au panama la regarde de ses yeux étranges, sans cils, et lui dit d’un ton presque mélancolique : «Vous êtes Hazel ? bien sûr – Hazel Jones ?» Elle lui assure qu’elle n’est pas Hazel Jones. L’homme au panama lui laisse sa carte. C’est le docteur Byron Hendricks, le fils du docteur Hendricks, décédé, qui ne l’aurait pas oubliée dans son testament.
Rebecca est la fille de Jacob Schwart, arrivé avec sa femme et ses deux garçons en novembre 1936 aux États-Unis. Des immigrants ayant fui l’Allemagne nazie. Il trouve, lui ancien professeur de lycée, un emploi de gardien dans un cimetière non confessionnel à la périphérie de Milburn. Il habite avec sa famille un vieux cottage de pierre décrépit à l’entrée du cimetière. Un quotidien fait d’humiliations, de frustrations, de pauvreté. Les interdits cernent Rebecca : les choses du sexe, bien sûr, mais aussi parmi les choses-à-ne-pas-dire l’aveu d’être juif et celui de parler allemand.
La jeune Rebecca sera témoin d’un drame épouvantable. Sa haine du père restera si forte que des années après, pensant à lui, elle se mordra les lèvres jusqu’au sang.
Revenons au présent. Le mari de Rebecca, Niles Tignor, souvent absent, travaille pour une fabrique de bière. Il s’avère être un homme monstrueux qu’elle quittera pour protéger son petit garçon. S’en suivra une longue errance parmi les villes, les différents petits boulots, les hommes.
Un roman sur la résilience et la survie où l’explication de l’existence ballottée et tourmentée de Rebecca ne sera dévoilée que dans les dernières pages très chargées en émotion. Un livre riche et puissant proposé par l’auteur des Chutes, Prix Femina 2005, un roman que je vous avais vivement invité à lire.
- Le choix des libraires : Mister Pip (1 choix)– Lloyd Jones – Michel Lafon, Neuilly-sur-Seine, France– 14/07/2012
C’est l’enthousiasme d’une lectrice et le bandeau de ce roman qui m’ont incité à le lire : “Je ne connais aucun livre qui montre de façon aussi jubilatoire et inattendue la puissance que peut exercer la littérature sur notre vie”. Diable ! Et comme ce propos est signé Nancy Huston, comment résister ?
Très vite nous voilà embarqués dans un roman dont on ne veut plus sortir tant on s’y sent bien.
Une petite île, presque oubliée de tous, où les évènements les plus atroces se produisent sans que le monde extérieur s’en formalise. L’île est en guerre. Pas de journal ni de radio pour informer. Juste des rumeurs et des ragots. Les habitants ont du poisson, des poules, des fruits. Tout ce qu’ils ont toujours eu, en fait. Sans compter leur fierté, comme disent les rebelles.
Les enfants ont cessé d’aller à l’école après le départ des enseignants qui ont pris le dernier bateau. Désormais pour quitter l’île il nous faudrait marcher sur l’eau.
Seul Bel Oeil n’est pas parti avec les autres blancs. Bel Oeil qui porte tous les jours le même costume, qui ne sourit jamais et qui quelque fois s’affuble d’un nez de clown. Bel Oeil qui tire un chariot sur lequel se tient Mme Bel Oeil, droite comme la reine des glaces. Lui s’appelle Christian Watts et il est aussi blanc que le blanc des yeux, mais d’un blanc maladif. Elle s’appelle Grace et est noire, comme les habitants de cette île, comme la narratrice, Matilda, une fillette maigrichonne âgée de treize ans.
Et voilà qu’un beau matin la classe réouvre. C’est Bel Oeil qui va faire la classe.
“Je ne suis pas enseignant mais je ferai de mon mieux (…) Pour être franc, je ne suis pas très savant. Loin de là. La plus grande vérité que je puisse vous transmettre tient en quelques mots : les sentiments qui nous unissent sont notre seule richesse. Oh, sans oublier M. Dickens, bien sûr”.
M. Watts lira à sa classe l’histoire de Pip, le héros des Grandes espérances de Charles Dickens.
Je ne vous en dis pas plus. Faîtes confiance à Nancy Huston et à moi-même : vous allez lire un extraordinaire roman, surprenant, poétique, bouleversant. Vous allez rire, vous allez avoir les larmes aux yeux. Vous allez ressentir un grand bonheur de lecture.
- Le choix des libraires : Les croissants du dimanche (1 choix)– Annie Saumont – Julliard, Paris, France– 14/07/2012
Dix-neuf nouvelles de trois à dix pages. Annie Saumont fait dans le court. Elle raconte, ne démontre jamais. Elle décrit ce que font ses personnages mais jamais ce qu’ils pensent. Elles ne portent aucun jugement sur eux. Pas de complaisance ni de sentimentalisme. Des histoires acides, des errances, des dérives. Des personnages fragiles souvent cabossés par la vie qui puisent au tréfonds d’eux-mêmes une formidable envie de vivre.
Elle a douze ans, elle venge sa mère qui est devenue boiteuse à la suite d’une bagarre dans un café… Maly prépare des sandwiches dans un Delicatessen, un jeune homme grand – beau dira-t-elle ?- l’entraîne dans une belle maison au porche à colonnades, ils échangent des frissons, des soupirs, il lui dit de rester là qu’il va chez des amis mais reviendra dans une heure, il ne revient pas… Il est élevé par sa tante Alice – un long nez, un regard impénétrable – une obsédée de la propreté et de l’ordre qui se méfie de tout ce qui salit – tout salit – mais un jour avec une éponge propre – Amélie a un BTS de gestion, ses deux frères leur brevet des collèges ; ils ont quitté le village ; ils ne donnent pas de nouvelles à leurs parents ; un jour leur mère ira à la ville voir comment ils s’arrangent… Une femme sur une plage qui vient d’écrire une lettre se terminant par : Viens ; c’est un autre qui arrive à l’improviste… Un orphelin qui est accueilli les week-end par une femme Karine, sourde, qui lui transmet de la tendresse ; mais voilà qu’un jour il voit le blouson d’un homme jeté sur le dossier d’une chaise…
Ah j’allais oublier : Annie Saumont a de l’humour et de la tendresse en vrac ainsi qu’un grand amour pour la liberté, celle du style en particulier ; elle n’a peur de froisser ni les bonnes moeurs, ni la grammaire.
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