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L’ile aux cannibales : 1933, une deportation-abandon en Siberie

Auteur : Nicolas Werth

Date de saisie : 17/03/2006

Genre : Histoire

Editeur : Perrin, Paris, France

Prix : 17.00 / 111.51 F

ISBN : 978-2-262-02434-5

GENCOD : 9782262024345

  • Les presentations des editeurs : 14/05/2006

En 1933, Staline et son commissaire du peuple a l’Interieur, Genrikh Iagoda, decident de “nettoyer les villes”, en premier lieu Moscou et Leningrad, vitrines du socialisme, de tous leurs “elements polluants”.
L’Ile aux cannibales raconte l’histoire de la deportation de 6 000 “elements socialement nuisibles” envoyes au camp de transit de Tomsk, en Siberie occidentale, et, de la, sur une petite ile au milieu de l’Ob, Nazino, a neuf cents kilometres plus au nord. En quelques semaines, les deux tiers des deportes, debarques sans provisions ni outils, meurent de faim au point de s’entre-devorer. Nazino devient l'”ile aux cannibales”.
L’episode a ete passe sous silence pendant soixante ans, avant l’ouverture des archives de la commission d’enquete diligentee devant la gravite des faits. Nicolas Werth est le premier historien occidental a les exploiter.
La tragedie de Nazino fut-elle programmee ou fut-elle le resultat d’une immense gabegie, d’un manque total de coordination entre les differents maillons de la chaine repressive ? La reconstitution minutieuse de l’evenement nous permet de mieux saisir le fonctionnement, encore tres mal connu, du systeme des “peuplements speciaux”, ce second goulag qui se developpa et prospera un quart de siecle durant, parallelement au systeme des camps de travail proprement dit. L’episode de Nazino en dit long aussi sur ce qui se passait dans les espaces largement incontroles de la Siberie, ce Far East sovietique, terre de deportation et de colonisation, gagnee par une extraordinaire violence sociale. Enfin, l'”ile aux cannibales” apparait comme un formidable laboratoire anthropologique d’un groupe d’individus soumis a une situation extreme dans un lieu clos ou l’homme est devenu un loup pour l’homme. A Nazino, l’utopie modernisatrice d’une ingenierie sociale parfaitement maitrisee a debouche sur un processus de decivilisation.

  • La revue de presse Edouard Waintrop – Liberation du 13 avril 2006

En 1933, le commissaire du peuple a l’Interieur, Genrikh Iagoda, envoya 6 000 elements socialement nuisibles dans le camp de transit de Tomsk, en Siberie. De la, ils furent diriges sur l’ile de Nazino, perdue au milieu du fleuve Ob, afin de peupler et de mettre en valeur les confins siberiens. L’affaire tourna mal. Aucune structure d’accueil n’ayant ete prevue, les deportes durent s’organiser, dans le froid et la faim. Ces conditions extremes provoquerent le pire : en quelques semaines, les deux tiers des deportes disparurent, certains s’efforcant de survivre en depecant leurs camarades d’infortune.

Le livre ne se borne pas a retracer, avec sobriete, un fait divers. Il le resitue dans un contexte plus ample. En rappelant, tout d’abord, que cette deportation-abandon totalement improvisee s’integrait dans de grandioses perspectives. Le pouvoir entendait controler les flux migratoires se dirigeant vers les villes tout en les purgeant des indesirables. Il contraignit donc les citoyens sovietiques a se faire enregistrer (passeportisation), contrevenants et elements socialement nuisibles etant aussitot deportes…

Sans remettre en question le bien-fonde des deportations, un communiste du cru, Vassili Velitchko, s’emut de la situation qui regnait a Nazino. La lettre qu’il ecrivit en 1933 a Staline suscita la creation d’une commission d’enquete. C’est sur ce document exceptionnel que s’appuie le recit bref et percutant de Nicolas Werth.

  • La revue de presse Thomas Wieder – Le Monde du 7 avril 2006

C’est la chronique d’une hecatombe annoncee. Le recit hallucinant d’une utopie bureaucratique qui tourne au carnage. Une “micro-histoire” qui est presque un cas d’ecole dans un pays ou l’invraisemblable est devenu la norme.

Nous sommes en 1933. L’URSS sort exsangue du premier plan quinquennal. La collectivisation des terres et l’industrialisation a marche forcee ont plonge la societe dans le chaos. Pour echapper aux famines et aux epidemies qui ravagent les campagnes, des dizaines de milliers de ruraux affluent vers les villes, ou la mendicite et la criminalite atteignent des sommets. En reponse, le pouvoir decide de vider ces cours des miracles de leurs “elements socialement dangereux”, une categorie juridique aux contours elastiques qui inclut aussi bien les chomeurs que les vagabonds et les petits trafiquants. Le sejour dans les grandes villes est desormais conditionne par la possession d’un “passeport”. Pour ceux qui ne recoivent pas le precieux sesame, le sort est sans appel : une procedure expeditive suffit a les expulser vers des camps de travail ou des “villages speciaux”.

“Villages speciaux” ? Voila la nouvelle marotte des responsables de la police politique (OGPU) et de la direction generale des camps (Goulag), qui y voient un moyen de tirer benefice d’une force de travail plethorique en l’assignant a des travaux agricoles, piscicoles, miniers et forestiers dans des territoires encore inexploites. En cette annee 1933, un million d’individus doivent ainsi etre achemines vers le Kazakhstan et la Siberie occidentale. C’est cette odyssee tragique que relate Nicolas Werth…

Nicolas Werth, a qui l’on doit notamment l’edifiante compilation des Rapports secrets sovietiques (Gallimard, 1995, en collaboration avec Gael Moullec), a une fois encore deniche des documents saisissants. Les temoignages cites depassent les limites du supportable…

  • La revue de presse Albert Algoud – Le Point du 16 mars 2006

En 1933, Staline donne son aval a un vaste plan de deportation de 2 millions d’elements antisovietiques dont il faut nettoyer Moscou et Leningrad, vitrines du socialisme. L’atrocite stalinienne se double d’une aberration ubuesque : sur 6 millions d’habitants, la Siberie, terre de travail force, compte deja 500 000 proscrits ! Les deportes, dont de nombreux enfants, des vieillards, des invalides et des handicapes mentaux, sont entasses dans des trains. A Tomsk, camp de transit surpeuple, sont decharges les cadavres et les survivants.

L’ile aux cannibales raconte un episode de cette deportation. six mille elements socialement nuisibles sont debarques, sans provisions ni outils, a Nazino, un ilot de l’Ob. Voyage au bout de l’enfer…