Manuelo de La Plaine

Claire Lamarre – 09/05/2007

21 juin 1937. Moi, Manuelo Timon, douze ans et demi, lo tengo, je l’ai eu, mon certificat d’etudes primaires ! C’est le plus beau jour de ma vie. Et le pire. J’apprends que ma mere a la tuberculose. Mon pere n’y peut rien. Personne n’y peut rien, et ca me rend fou de colere et de peine. Avec mes amis, on se jure de trouver l’argent pour la sauver.

Parmi les ouvriers de la Petite Espagne a La Plaine-Saint-Denis, partagez les joies et les peines d’un heros courageux et tendre. Un roman bouleversant.

– Alors ? s’impatiente la Farce.
– Devine, je dis.
Un coup de pied s’enfonce dans mes cotes.
– Rouge ! Rouge avec des petits trous…
– Bon, c’est mon tour !
Brise-Fer m’empoigne le bras, il m’extirpe de ma cachette. Je prends sa place la-haut, il se coince sous la table, ralant, poussant a cause de ses impossibles epaules. C’est notre jeu prefere entre deux sacs de megots : traquer les petites culottes de Regina Guttierez et de ses nieces. Trois d’entre nous s’assoient a table, les pieds bien cales le long des chaises. Les deux autres se planquent en dessous, au ras du sol. La plupart du temps, il faut l’avouer, on voit surtout des hordes de chaussures. Mais le spectacle vaut bien l’attente, quelques doigts ecrases et des crachats evites de justesse. Aujourd’hui j’ai vu celle de Marcelina, et celle de Margarita. Une rouge brillante comme une flaque de sang, pas croyable, et une beige informe bonne a oublier. Pour les copains du foot, j’en apercois toujours un peu plus : j’echange mes recits contre les biscuits du gouter.