
Auteur : Raphael Confiant
Date de saisie : 12/09/2006
Genre : Romans et nouvelles – francais
Editeur : Ecriture, Paris, France
Prix : 16.95 / 111.18 F
ISBN : 978-2-909240-71-8
GENCOD : 9782909240718
- Les presentations des editeurs : 12/09/2006
Au Pays-Martinique, depuis le temps de l’esclavage, le Negre n’a jamais cesse de marronner, d’echapper a ses fers, solides ou immateriels, en gagnant les grands bois, les quartiers plebeiens ou meme les iles avoisinantes. Simon est l’un d’eux. Debarque d’Afrique-Guinee au XVIIe siecle, fouette au XVIIIe dans la gehenne des plantations, gagne au XIXe par la fievre de l’abolition puis au XXe par celle des greves marchantes…
Affame de nostalgie, de liberte, de vengeance ou simplement d’igname, Simon est la proie de reves insenses : retourner au Pays d’Avant, assassiner son maitre, s’evader vers d’autres Antilles, preparer l’avenement de la classe ouvriere, voire detruire le pays entier. Mais qui entend son cri, consigne dans nul registre ou cahier de doleance ?
A l’ecoute de son ame errante, confinee dans une ile-prison, Raphael Confiant prete au Negre marron son verbe apre et melancolique. Cette fable tragique a la saveur d’un mythe, celui de la creation d’un monde : l’univers creole de la Martinique d’hier et d’aujourd’hui.
Ne en 1951 a la Martinique, l’un des chefs defile du mouvement litteraire de la Creolite avec Patrick Chamoiseau et Jean Bernabe, Raphael Confiant a d’abord publie des textes en langue creole, avant de rencontrer le succes avec ses romans en francais, parus notamment aux editions Grasset f Le Negre et l’Amiral, prix Antigone 1988 ; Eau de Cafe, prix Novembre 1991) et au Mercure de France (Adele et la Pacotilleuse, 2005). Les editions Ecriture ont publie sa trilogie sucriere (Commandeur du sucre, Regisseur du rhum et La Dissidence,), ainsi qu’une version mise a jour de son essai-manifeste, Aime Cesaire, une traversee paradoxale du siecle (2006).
- Les courts extraits de livres : 12/09/2006
Fait ce 24 avril 1687 au nom de Sa Majeste le Roy de France.
(Paul-Henri de Lagrange, secretaire du gouverneur de l’isle de la Martinique)
Au Pays d’Avant, votre village s’etalait au mitan de la savane et sa terre rouge, ses arbustes etiques, son ciel pur. L’horizon etait a portee de regard. L’eau rare. Il fallait creuser des puits et des puits et encore des puits, les premiers se tarissant au fil du temps, et il arrivait que pendant une annee entiere il ne pleuve pas une seule journee malgre les prieres ferventes adressees aux divinites. Ici-la, a l’inverse, tout n’est que mornes abrupts a la vegetation enchevetree, rivieres bondissantes qui deversent une onde diaphane qu’on aurait juree infinie. Helas ! toute cette debauche de vie ne produit rien qui soit comestible, aucun fruit, hormis ces prunes orangees qu’affectionnent les merles et que leur gout acre vous oblige a recracher la-meme. Pour trouver oranges, mandarines, goyaves, tamarins, corossols ou bananes, il vous faut descendre aux abords des plantations, quasiment a decouvert. La ou les chiens flairent votre odeur de loin et se mettent a japper de concert, reveillant les cases a Negres et plongeant leurs habitants dans une irrepressible agitation. Vous voyez alors s’allumer des flambeaux en bambou. La vaste batisse blanche ou vit leur maitre s’anime a son tour. Vous percevez l’echo de paroles breves, hurlees par les plus braves. Vous voyez une colonne de lumiere qui progresse au pas de charge, serpente au beau mitan des cannes, conduite par les chiens. La battue peut se poursuivre l’entier de la nuit. Vous savez qu’ils ne grimperont pas jusqu’a votre refuge.