
Auteur : Albert Londres
Preface : Pierre Assouline
Date de saisie : 30/08/2007
Genre : Romans et nouvelles – francais
Editeur : Arlea, Paris, France
Collection : Litterature generale
Prix : 30.00 / 196.79 F
ISBN : 978-2-86959-789-1
GENCOD : 9782869597891
Sorti le : 30/08/2007
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- Le choix des libraires : Choix de Laurent Lebourg de la librairie PRIVAT CHAPITRE a PERPIGNAN, France (visiter son site) – 12/03/2010
… J’ai decide de vous parler de mon coup de coeur : il s’agit de la reedition des ?uvres completes d’Albert Londres aux editions Arlea. Albert Londres, c’est un journaliste, un tres grand reporter assez connu dans le monde de la presse et tres peu connu dans le monde des lettres alors qu’il a une veritable plume d’ecrivain. On lui reprochait d’ailleurs dans ses redactions d’avoir introduit le virus de la litterature dans le monde de la presse. Il a une vie et une mort de grand reporter puisqu’il a disparu mysterieusement dans les annees trente en mer Rouge lors de l’incendie de son navire qui le ramenait en France apres avoir traite d’un sujet tres mysterieux et qui lui a probablement coute la vie d’apres les rumeurs sur la Chine. C’etait vraiment un grand reporter qui avait sillonne en l’espace d’une quinzaine d’annees toute l’Europe et le monde. Il traitait de sujets fort divers comme les Comitadjis, des mouvements terroristes dans les Balkans, les asiles de fous ; il s’interessait a la Chine des seigneurs de la guerre ; il traitait du bagne en Guyane, de la prise de la ville de Fiume par l’aventurier d’Annunzio. Sa particularite, c’est qu’il avait tendance a ruiner ses directeurs par ses notes de frais enormes, ce qui contribuait au fait qu’il etait souvent chasse d’un journal a l’autre. Moi, personnellement, j’aime beaucoup Albert Londres pour son ton, pour sa capacite a nous faire revivre des epoques revolues comme notamment celle de l’entre-deux-guerres, la singularite de sa plume. C’etait, loin du ton laconique de tout reporter journalistique, de retranscrire un recit foisonnant ou la derision etait un peu son arme de predilection, et elle faisait, c’est vrai, des ravages ; il etait d’ailleurs l’ami d’un autre journaliste qui s’appelait Henri Beraud et qui avait donne une sorte d’intitule remarquablement poetique a sa profession dans la mesure ou il se qualifiait de flaneur salarie, meilleur qualificatif pour Albert Londres. Enfin, pour terminer, je dirai que ses grands reportages ont contribue a faire evoluer la societe puisque c’est grace a lui que l’on a mis un terme a plus ou moins breve echeance au bagne de Guyane. C’etait en quelque sorte une sorte de Dante moderne qui descendait aux enfers de notre Republique, mais avec la ferme intention d’adoucir cet enfer par ses articles qui ont fait mouche…
- Le journal sonore des livres : Lu par L – 11/10/2007
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Laurent Lebourg – 11/10/2007
- Les presentations des editeurs : 08/09/2007
ALBERT LONDRES
OEUVRES COMPLETES
Presentees par Pierre Assouline
Disparu en mai 1932 dans l’incendie du paquebot Georges-Philipar qui le ramenait de Shanghai, Albert Londres n’en finit pas de fasciner aussi bien les journalistes que ses lecteurs. Prince inconteste du grand reportage, voyageur infatigable et hardi redresseur de torts, il ne cessa sa vie durant de porter la plume dans la plaie. On trouvera rassembles ici les onze livres-evenements de celui qui – selon son biographe Pierre Assouline, qui presente cette edition – nous montra la grand’route.
- Les courts extraits de livres : 08/09/2007
VERS LA GUYANE
Quand ce matin, le Biskra qui, naguere, transportant des moutons d’Alger a Marseille et, maintenant promu au rang de paquebot annexe dans la mer des Antilles, eut jete l’ancre devant Port-d’Espagne, les passagers de tous crins et de toutes couleurs, Chinois, creoles, Blancs, Indiens, entendirent ou auraient pu entendre le commandant Maguero crier de sa passerelle : Non ! Non ! je n’ai ni barre, ni menottes, ni armes, je n’en veux pas !
En bas, sur la mer, onze hommes blancs et deux policiers noirs attendaient dans une barque. C’etait onze Francais, onze forcats evades, repris et qu’on voulait rembarquer pour la Guyane.
Le soleil et la fatalite pesaient sur leurs epaules. Ils regardaient le Biskra avec des yeux emplis de tragique impuissance. Puis, se desinteressant de leur sort, de la discussion et du monde entier, ils courberent la tete sur leurs genoux, se laissant ballotter par le flot.
Les autorites anglaises de Trinidad insistant pour se debarrasser de cette cargaison, on vit arriver peu apres un canot qui portait le consul de France.
– La prison de Port-d’Espagne n’en veut plus, et moi je ne puis pourtant pas les adopter, gardez-les, commandant, fit le consul.
Il fut entendu que les Anglais preteraient onze menottes et que trois surveillants militaires rentrant de conge et qui regagnaient le bagne dans les profondeurs du Biskra seraient requisitionnes et reprendraient sur-le-champ leur metier de garde-chiourme.
Alors, le commandant cria aux deux policiers noirs :
– Faites monter.
Les onze bagnards ramasserent de miserables besaces et, un par un, jambes greles, gravirent la coupee.
Trois gardes-chiourme ayant revetu la casquette a bande bleue, revolver sur l’arriere-train, etaient deja sur le pont.
Mettez-vous la, dit l’un d’eux.
Les bagnards s’alignerent et s’assirent sur leurs talons.
Quatre etaient sans savates. Chiques et araignees de mer avaient abime leurs pieds. Autour de ces plaies, la chair ressemblait a de la viande qui a tourne, l’ete, apres l’orage. Sur les joues de dix, la barbe avait repousse en rape serree, le onzieme n’en etait qu’au duvet, ayant vingt ans. Vetus comme des chemineaux dont l’unique habit eut ete mis en loques par les crocs de tous les chiens de garde de la grand’route, ils etaient pales comme de la bougie.
– Et s’ils s’emparent du bateau ? demandaient avec angoisse des passagers n’ayant aucune disposition pour la vie d’aventures.
Pauvres bougres ! ils avaient plutot l’air de vouloir s’emparer d’une boule de pain !
Les surveillants reconnaissaient les hommes.
– Tiens ! dit l’un d’eux au troisieme du rang, te voila ? Tu te rappelles ? C’est moi qui ai tire deux coups de revolver sur toi, il y a trois ans, quand tu t’evadas de Charvein.
– Oui ! repondit l’homme, je me rappelle, chef ! Le sixieme se tourna vers son voisin :
– Reluque le grand (le plus grand des surveillants), pendant ses vacances il s’est fait dorer la gueule avec l’argent qu’il vola sur nos rations.
– Debout ! commanda le chef.
Les onze forcats se leverent tout doucement. Le consul quittait le bord.