Auteur : Jean-Jacques Salgon
Date de saisie : 13/05/2008
Genre : Biographies, memoires, correspondances…
Editeur : Escampette, Chauvigny, Vienne
Prix : 15.00 / 98.39 F
ISBN : 978-2-35608-000-4
GENCOD : 9782356080004
Sorti le : 24/05/2008
- Les presentations des editeurs : 20/05/2008
Jean-Jacques Saigon est ne en Ardeche ou il a frequente la petite ecole de son pere, instituteur laique, republicain et pedagogue adepte des methodes Freinet. Ce rude pays et ce pere au caractere trempe auront sur lui et sur ses livres une influence profonde.
Papa fume la pipe est un hommage a ce pere mort a 96 ans. Le premier tableau du livre nous le montre, couche dans son cercueil, revetu d’habits qui le font ressembler a un Communard fusille par des Versaillais. Puis, de tableau en tableau, on remonte le temps dans un recit empreint de nostalgie et d’humour. On apercoit Gerard Philipe a Avignon, Genevieve Page au volant de sa BMW decapotable bleue et quelques autres, on part en vacances en Italie en caravane, on roule en 2 CV glorieuse, et a force de remonter le temps on se retrouve en culottes courtes, dans la classe de l’instituteur, ou le futur auteur s’exerce a ecrire au tableau : Papa fume la pipe, maman fait du cafe.
Jean-Jacques Saigon a publie en 1993, chez Verdier 07 et autres recits, puis a L’Escampette en 2000, Tu ne connaitras jamais les Mayas ; en 2005, Les sources du Nil (chroniques rochelaises, prix du livre Poitou-Charentes).
- Les courts extraits de livres : 20/05/2008
Ce matin, nous avons enterre mon pere dans la tombe familiale du petit cimetiere des Vans. On venait juste de feter ses 96 ans. La levee du corps s’est faite a la chambre funeraire de la societe des Pompes Funebres. C’est un local moderne, amenage pour recevoir des visites, avec un salon de repos et un distributeur de boissons. C’est moi qui ai choisi le cercueil, un modele en chene plaque, sans ornement, mais pas le moins cher tout de meme. Mon pere a ete prepare, c’est-a-dire qu’on a du l’embaumer et sans doute aussi le maquiller legerement. Il pourra tenir plusieurs jours malgre la chaleur m’a dit l’employe. Avec son foulard rouge, sa polaire rouge, bien raide dans son cercueil, mon pere ressemblait a un acteur grime pour quelque evocation historique de la Commune ou du Front Populaire. Ce n’etait plus tout a fait lui, ce corps rendu presentable. Le col de sa chemise a petits carreaux que je lui avais pourtant toujours vue semblait soudain le detail d’un costume.
C’etait donc ce mannequin qui etait charge de me faire savoir que mon pere etait mort, et qu’une fois le couvercle referme et les boulons visses, il ne faudrait plus trop compter le revoir.
Au cimetiere, il faisait beau mais non encore trop chaud. Toute la campagne alentour vibrait sous la lumiere estivale. On entendait des cigales, une abeille bourdonnait pres des lavandes, des voitures passaient en petaradant. C’etait somme toute une belle journee de juillet.
La ceremonie civile n’a pas ete tres longue, il y avait peu de monde car mon pere avait souhaite que l’annonce ne paraisse qu’au lendemain de ses obseques. Apres les prises de paroles, on a tous chante Le Temps des Cerises, accompagnes a l’accordeon par Coco, un fils d’instituteurs laiques qui etaient de bons amis de mes parents. Et puis les croque-morts ont fait descendre le cercueil au fond de la fosse et ceux qui ont voulu ont jete un peu de terre par-dessus.
Ma mere, qui n’avait pas souhaite venir a la ceremonie, est restee a Aubenas. Une cousine est venue lui tenir compagnie.
Quand tout a ete fini, on est alle pique-niquer a Chantegai, au bord du Chassezac, sur le terrain que mon pere avait acquis puis amenage et sur lequel il avait construit un cabanon. La table plastique, c’est lui qui l’avait achetee au centre Leclerc. Il me demandait toujours de deviner le prix tant il etait content de l’avoir payee si peu cher.
La veille au soir, on avait eu un magnifique feu d’artifice. Ce n’est peut-etre pas tout a fait le hasard qui a voulu qu’il soit enterre un quatorze juillet.