Auteur : Frederique Traverso
Date de saisie : 09/02/2007
Genre : Romans et nouvelles – francais
Editeur : Belfond, Paris, France
Collection : Litterature francaise
Prix : 16.00 / 104.95 F
GENCOD : 9782714442871
L’Alinea (Martigues)Dialogues (Brest)Durance (Nantes)Maison du livre (Rodez)Mollat (Bordeaux)Ombres Blanches (Toulouse)Sauramps (Montpellier)Thuard (Le Mans)
- Les courtes lectures : Lu par Sylvain Elie – 27/02/2007
Telecharger le MP3
Sylvain Elie – 27/02/2007
- Les presentations des editeurs : 09/02/2007
Quand j’en ai vraiment par-dessus la tete, je cuis un crabe. J’abandonne tout, absolument tout, pour courir chez le poissonnier, ou je choisis mon crustace avec le plus grand soin. Il doit avoir une belle couleur, reagir a la stimulation et peser un bon kilo. Sitot rentree chez moi, je m’enferme avec lui dans la cuisine. […]Je surveille toujours avec attention cette cuisson pleine de promesses. Une heure en tete-a-tete avec mon crabe. A le decortiquer a ma facon, presque ceremonieuse, a le depouiller de ses chairs succulentes et nacrees, a recueillir son corail et ses oeufs. Une heure entiere a le savourer des yeux, du nez, des doigts, de la langue. Une etrange felicite s’empare de moi pendant que je dispose assiette, saladier, casse-noix, solide couteau et longue pince sur la table.
J’ai fait poser un verrou sur la porte de la cuisine. La cuisine est mon domaine. Ainsi que le jardin…
Elle est femme au foyer, mere de jumeaux qu’elle trouve affreusement laids. Ce soir, elle recoit dans sa villa cossue les collegues et le patron de son mari. Pas question de commettre la moindre erreur, l’epoux compte bien decrocher une promotion a la fin du repas. Mais toutes les bonnes volontes du monde ne peuvent rien quand le cauchemar s’invite a diner…
Porte par une ecriture cocasse et corrosive, Pieds nus, en smoking livre un recit singulier, decale mais lucide. Une satire sociale hilarante sur la deprime des cadres et le baby-blues.
Frederique Traverso vit a Lyon. Laureate de la bourse Thyde-Monnier et finaliste du prix du Premier Roman pour Les Voyoutes (Grasset, 1998), elle a publie L’Ombre d’un capitaine en 2003 aux editions du Rocher. Pieds nus, en smoking est son troisieme roman.
- Les courts extraits de livres : 09/06/2009
Dans leur parc installe sur la terrasse, les jumeaux, qui se disputaient un jouet, se mirent a hurler et je fus obligee de m’ecarter. Le dos appuye contre le mur en pierre blanche de la maison, le visage offert au soleil de juin, je tentai de rassurer mon mari. Depuis notre mariage, deux ans plus tot, j’avais pris l’habitude de faire face a de nombreux diners impromptus. Mais Paul me prevenait quelques heures a l’avance afin de me permettre de tout organiser. Cependant, si j’etais angoissee, je savais que cela ne pouvait pas mieux tomber. Durant la matinee, un somptueux civet de lievre avait mijote a la cuisine. La veille, j’avais decongele la bete et prepare la marinade. Ce plat etait destine au dejeuner familial du lendemain, ou nous devions recevoir ma mere et son nouveau mari, ainsi que mon frere, encore celibataire. Tant pis, je n’avais pas le choix et devais m’adapter a la situation. Tres jeune j’avais montre de l’interet pour la cuisine et, a vingt-cinq ans a peine, j’etais devenue une bonne cuisiniere. Ce civet, a n’en pas douter, allait sauver mon diner.
- Les courts extraits de livres : 09/02/2007
Une fois mon crabe au refrigerateur, je mis a decongeler deux blocs de pate feuilletee puis rassemblai divers ingredients. L’enjeu est crucial, me repetais-je avec une impatience febrile. A present, mes belles provisions me paraissaient insuffisantes. Cette peur de manquer qui toujours m’assaillait en pareille situation avait tourne a l’obsession au fil des mois, et j’etais incapable de m’en defaire puisque a chacun de mes diners elle se revelait en partie justifiee. Car les gens, il faut bien le dire, ont l’habitude de devorer. J’avais beau etre prevoyante, il arrivait souvent que quelque chose fut sur le point de manquer. Les gens ont un appetit feroce, rien ne les arrete, leur faim est insatiable, ils devorent et se remplissent, comme mus par une exigence primitive, ils trouvent mille raisons de le faire.
La pate feuilletee n’etant pas tout a fait prete, je retournai sur la terrasse.
– Olivia ! criai-je.
Elle se trouvait sous le saule du jardin, perchee sur la balancoire. Je courus jusqu’a elle, tandis qu’elle levait sur moi ses grands yeux verts. Une fois de plus, je me dis qu’elle se montrait etonnamment reservee pour une adolescente de quinze ans.