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Semences magiques

Auteur : Vidiadhar Surajprasad Naipaul

Traducteur : Suzanne V. Mayoux

Date de saisie : 19/09/2005

Genre : Romans et nouvelles – etranger

Editeur : Plon, Paris, France

Collection : Feux croises

Prix : 21.00 / 137.75 F

ISBN : 978-2-259-20039-4

GENCOD : 9782259200394

  • Les presentations des editeurs : 14/05/2006

Willie Chandran – deja presente dans La Moitie d’une vie – est un homme qui a laisse s’imposer a lui une identite apres l’autre. Aujourd’hui, apres une vie itinerante, alors qu’il entre dans la quarantaine, cedant aux encouragements insistants de sa soeur, il part rejoindre un mouvement clandestin en Inde, en principe voue a l’affranchissement des castes inferieures. Mais sept annees de campagnes revolutionnaires et d’emprisonnement vont le convaincre que la revolution n’avait rien a voir avec les villageois pour lesquels ils luttaient. De retour en Angleterre, ou avaient commence, trente ans plus tot, ses errances psychologiques et physiques, il se trouve confronte au fruit d’une autre revolution sociale inattendue (d’autres semences magiques), et en arrive a se voir comme un homme “purgeant une peine de prison sans fin” – une revelation qui finira peut-etre par liberer sa veritable personnalite. Semences magiques est un chefs-d’oeuvre, ecrit avec toute la profondeur et la resonance, la lucidite et la precision du langage qui constituent l’empreinte de ce brillant ecrivain.

Ne a Trinidad en 1932, sir V S. Naipaul a publie plus de vingt ouvrages de fiction et de non-fiction, dont Une maison pour Monsieur Biswas (1964), Guerrilleros (1981), A 1a courbe du fleuve (1982), L’Enigme de l’arrivee (1991), L’Inde, un million de revoltes (1992), jusqu’au bout de 1a foi (1998) et La Moitie d’une vie (2002). Il a recu les plus grands prix litteraires et, en 2001, le prix Nobel de litterature.

  • La revue de presse Florence Noiville – Le Monde du 27 octobre 2005

… Changer le monde : voila bien ce dont il s’agit chez V.S. Naipaul. C’est meme l’idee fixe qui, de bout en bout, sous-tend ce dernier roman, Semences magiques. Comme une basse continue, cet objectif hante et mine de l’interieur le narrateur, Willie, jeune Indien venu faire ses etudes a Londres puis emigre dans un pays d’Afrique – sans doute le Mozambique. Ce meme Willie, dont nous avions suivi les pas dans le precedent roman de Naipaul, La Moitie d’une vie (Plon, 2002), nous le retrouvons cette fois a Berlin. Il est rentre d’Afrique ou l’on devine qu’il s’est montre oisif et couard. Qu’il est passe a cote des enjeux politiques dont il a ete le temoin. Qu’il se reproche sa lachete envers son ancienne femme. Qu’il n’est pas dupe de lui-meme et sait que sa facon de reflechir consiste a “repousser les choses au fond de sa tete”. Bref, nous retrouvons cet antiheros tetanise par l’indecidable. A Berlin, c’est sa soeur, Sarojini, qui lui fait la lecon. Pourquoi ne repartirait-il pas de zero ? Pourquoi ne renouerait-il pas avec ses racines indiennes en allant sur place lutter pour l’affranchissement des castes inferieures ? Sensible au brio convaincant de cette intellectuelle, Willie finit par ceder a ses encouragements et part rejoindre un mouvement clandestin en Inde du Sud.

C’est cette nouvelle vie que decrit Naipaul… Bien au-dela du cas indien, le roman de Naipaul fait echo a la detresse presente dans toutes les zones du monde troublees par le terrorisme et le fondamentalisme. C’est la que reside son originalite : il montre comment une aspiration revolutionnaire peut etre suspecte et pervertie. Et comment elle peut detruire un personnage pris dans les rets d’une ideologie vaseuse…

  • La revue de presse Andre Clavel – L’Express du 6 octobre 2005

Naipaul, c’est une signature tres haut perchee, un rapace tournoyant sur les desordres du monde. Pour converser au bord du chaos en enjambant frontieres et cultures, il faut s’adresser a ce geant qui, tel Atlas, porte tous les fardeaux de la planete sur ses larges epaules. Observateur universel, feroce chroniqueur du desarroi postcolonial, le Nobel 2001 ne cesse en effet de multiplier les declarations alarmistes pour signifier que notre epoque est malade. Avec, ces derniers temps, une attention toute particuliere pour l’islam, ou Naipaul voit l’incarnation du Grand Satan.

Mais il ne faudrait pas oublier que cet Indien des Caraibes – il a emigre a 20 ans en Angleterre – est aussi un des pontifes de la world fiction, une sorte de Dickens tropical qui puise son inspiration dans le tumulte des ames perdues : ses personnages preferes sont souvent des etres dechires, des apatrides tirailles entre des mondes antagonistes. C’est le cas de Willie Chandran, le heros de Semences magiques, second volet de La Moitie d’une vie (recemment reedite en 10/18). Parce que son pere a renie la noblesse de sa caste pour epouser dans l’Inde des annees 1930 une declassee, Willie est un sang-mele, theme cher a Naipaul, qui ne parvient pas a assumer sa naissance honteuse, sous le signe de la batardise… Quand s’ouvre Semences magiques, a la fin des annees 1970, Willie se trouve a Berlin. Il a la quarantaine. Il sait qu’ il ne sera jamais chez lui nulle part ; il est un vagabond, presque une epave. Mais, en quelques semaines, sa soeur, Sarojini – une redoutable petroleuse ! – va le remettre debout. Et le convertir a une nouvelle religion, la revolution… Cruel Naipaul qui, avec ces Semences magiques si peu feeriques, signe un conte moral dur et froid comme le marbre…

  • La revue de presse Antoine de Gaudemar – Liberation du 15 septembre 2005

… Comme dans le precedent volume, l’ecrivain britannique d’origine indienne et ne a Trinidad s’interroge sur la place qu’un homme peut occuper dans le monde quand il est exile, tiraille entre des cultures et des valeurs differentes, incapable de faire des choix. Son heros, Willie Chandran, appartient a cette categorie : apres des debuts remarques en litterature, ce jeune Indien debarque a Londres a la fin des annees 50 a suivi une de ses admiratrices au fond de la brousse africaine. Dix-huit ans apres, il rentre seul en Europe, a Berlin, ou sa soeur, emigree elle aussi, le convainc de rejoindre un groupe de guerilleros dans son pays natal. Funeste retour en Inde, ou il decouvre l’envers bien peu romantique de la guerilla, les semaines de desoeuvrement, les operations foireuses, la tyrannie des petits chefs et la petitesse des combattants. Au bout de sept ans, il se rend aux autorites et croupit en prison, d’ou finira par le sortir son passe d’ecrivain prometteur. Revenu a Londres, il pense trouver dans l’architecture une nouvelle passion, mais y croit-il vraiment ?… Semences magiques surprend par son ton, froid, presque atone, la description est clinique, les protagonistes sont quasi sans os ni chair, et parlent comme des manuels politiques. Seul personnage un peu reel dans cette galerie typologique, l’ami anglais de Willie Chandran, avocat englue dans des affres professionnelles et sentimentales tres concretes, au contraire de Chandran lui-meme, ectoplasme ballotte au gre des ideaux du moment, en definitive aussi inconstant qu’inconsistant. Depuis plusieurs annees, V.S. Naipaul exprime ses doutes sur la capacite du roman a rendre compte du monde d’aujourd’hui, de sa complexite et de ses bouleversements. Semences magiques illustre jusqu’au risque ce scepticisme.

  • La revue de presse Marc Lambron – Le Point du 15 septembre 2005

Pour V. S. Naipaul, prix Nobel de litterature 2001, l’ecriture a toujours ete une schizophrenie attenuee. Indien de la Caraibe, ex-colonise donnant des lecons de culture aux anciens maitres, contempteur de l’angelisme tiers-mondiste et auteur anobli par la reine, il se distingue par sa facon de lancer des noix de coco avec des gants blancs, visant indifferemment les majors a moustache et les rajahs a turban. Son dernier roman, Semences magiques, pousse a l’extreme ce cosmopolitisme atrabilaire : de la cigue dans le darjeeling…

Nous sommes dans les annees 80, avant la chute du Mur. Que faire ? Assimile honteux, Chandran cultive avec retard les prejuges que les progressistes europeens entretenaient sur le salut par la guerilla. Il choisit donc de rallier l’Inde pour s’enroler dans un mouvement de liberation des damnes de la terre. Payant a son corps defendant le prix d’une certaine credulite occidentale, mais convaincu qu’il lui faut repandre les semences magiques du changement social, voici qu’il revit dans sa chair toutes les mythologies des maquis populaires… Fakir en smoking se couvrant la tete de cendres, le Naipaul de Semences magiques parait, a 73 ans, toucher a une dereliction proche des versets de l’Ecclesiaste… L’oeuvre de l’insulaire Naipaul pourrait se lire tout entiere comme l’odyssee d’une conscience interloquee. Mais quand on rentre a Ithaque, le palais est brule, et d’ailleurs y a-t-il jamais eu de palais ? Le Taj Mahal est un songe, les petitions d’identite autant de simulacres. Dans cette moire de postures extremes, de la plus revolutionnaire a la plus reactionnaire, on sent le craquelement intime d’un personnage, et peut-etre d’un auteur, qui assassine toutes les marionnettes pour poignarder en lui toutes les ventriloquies. C’est un roman terrifiant de vivisection et de lucidite distantes. Un autodafe ou l’on jette les illusions comme des veuves indiennes sur le bucher. Moralite provisoire : On a tort d’avoir une vision ideale du monde. C’est la que tout commence a s’embrouiller.