Villa Nirvana

Cap de Bonne-Esperance.
Un agent de la DGSE est porte manquant. Son frere de combat au Service Action, Francois Vargas, mene l’enquete. Installe dans une maison adossee au granit, la Villa Nirvana, l’espion affronte les pires superstitions.
Un grand requin blanc – tueur absolu – croise au large, des psychopathes hantent la nuit, les enfers ravagent les regards de Kimberley, la patronne des coast guards, et de Heather, princesse de sang xhosa.
La menace rode-t-elle vraiment sous les eaux profondes ?
Pourquoi tant de violence sous les lunes noires ? Rites cruels ou legendes obscures ?
En Afrique, tout est question de masques.
Le soir tombe. Le docteur, un vent austral cruel, se leve sur l’ocean Indien, rafale les cretes de Judas Peak, tourmente la lande, et, inexorablement, fond sur un cap de naufrages.
Les persiennes commencent a chanter.
Bienvenue a la Villa Nirvana.

Depuis vingt ans, Vincent Crouzet sillonne l’Afrique australe.
Son hobby : trainer la ou personne ne veut aller.
Expert en geostrategie, il a publie deux thrillers :
La Tete du cobra et Rouge intense.

13 mai, 17h24

Scarborough.
147 habitants en basse saison. De novembre a avril, un havre pour lunes de miel. Les autres mois, un exil.
Ce n’est pas encore une impasse de la M65. La route va au-dela.
La tempete m’avait rattrape quelques kilometres avant les horizons de sable de Witsand Bay. J’avais precautionneusement demarre, puis j’avais longe la vaste dune sauvage. Au milieu de l’immensite sableuse, deux surfeurs fous sortaient a peine la tete de leurs planches transformees en abri de fortune. Certainement hebetes par la violence du deluge, et soulages d’avoir survecu.
Je suis reste en seconde en roulant lentement. J’ai observe. Je reviendrai ici.
C’est un lieu fantasmagorique. Mais je ne suis pas un touriste. Ni un surfeur.
J’ai une raison tres precise de revenir ici.
Six kilometres separent ce point precis et l’entree de Scarborough. Avant de decouvrir les premiers toits bleus de la localite, il reste un ultime verrou a franchir : l’ombre portee des parois des Misty Cliffs, sentinelles de granit qui pourraient proteger la bourgade des vents du nord. Mais rien ne protege Scarborough du vent.
Voila donc ce bled face a l’ocean. Pres de trois cents maisons qui affrontent l’horizon.
Apres le passage de l’ouragan, la lumiere est plus vive encore. Je chausse a nouveau mes lunettes de soleil. Ici, ce n’est plus Witsand Bay, c’est moins sinistre parce que resistent des habitations. Mais les arbres poussent eternellement courbes. Apres la colere, la serenite. Dans cette paix retrouvee, Scarborough apparait pimpante.
Je dois denicher maintenant la guest-house ou j’ai reserve une premiere nuit. Le bled est desert. Pas une ame. C’est vrai que, quelques minutes plus tot, l’enfer est passe par la. Une rue centrale traversee par des nuees de touristes durant l’ete austral, mais recueillie ce soir d’automne. Je stoppe, jette un oeil sur trois panneaux. L’eau s’est deja ecoulee. Scarborough est batie sur du sable, une dune qui mange une montagne rude. Le sol pompe vite les tourments.
J’enquille sur ma droite une rue qui rejoint une parallele a la plage de Schuster’s Bay. Nidifiees a l’abri des arbres tortures du fynbos, des habitations en bois clair sur un front de mer sauvage. Propret mais rien de trop civilise. La plupart des villas paraissent inhabitees passe le mois d’avril.
Tout au bout sur Beach Road. C’est une maison de bois, de pierre et de brique qui s’ouvre a l’ocean. Je gare la BMW sur un petit parking desert. Huit marches a gravir, avec du vent, pour l’heure leger, mais qui monte progressivement.
Je sonne. Quelques instants, moins d’une minute, puis :
– Monsieur Vargas ?
– Madame Mandrake ?